Un jeu d'enfants

Elle fait le buzz sur la toile et se hisse au sommet du top de visionnage sur la plateforme Netflix dans plusieurs pays ; il s’agit de la nouvelle série sud-coréenne Squid Game. Créée par Hwang Dong-hyeok, cette production a mis peu de temps pour avoir son lot de fans. Comme j’aime particulièrement tout ce qui nous vient de l’Orient, impossible de passer à côté de cette série qui semble, qui plus est, envoyer du lourd en matière de scénario et de controverse. Jouer à des jeux de gamins pour se faire du pognon, est-ce légitime ? La lutte des classes est-elle si violente ? Est-ce que quelqu’un connaissait les règles du jeu du calamar avant de visionner cette série ? On se souvient de la belle époque des Pogs et on se lance dans la critique !

Seong Gi-hun (Lee Jung-jae) est passablement dans la dèche ; il n’a pas de boulot, est en pleine procédure de séparation, peine à voir sa fille et vit au crochet de sa maman relativement âgée. Devant de l’argent à une bande de malfrats et apprenant que sa fille va quitter le pays définitivement, il a plus que jamais besoin de thunes. C’est alors qu’apparaît un homme étrange qui lui propose de participer à une série de jeux. S’il gagne, il pourrait remporter une importante somme d’argent. Ne sachant pas dans quelle galère il s’embarque, Seong Gi-hun accepte.

Les jeux mortels ont le vent en poupe (et pas en poulpe, ha, ha) depuis plusieurs années. Lorsqu’on découvre Squid Game, on ne peut s’empêcher de repenser au majestueux Battle Royale de 2000, mais aussi à la série Alice in Borderland (2020), les films Hunger Games (2012-2015), 13 Sins (2014) ou le méconnu Would You Rather (2012). La comparaison la plus notable pourrait être avec As The Gods Will (2014) de Takashi Miike, reprenant également le concept des jeux pour enfants à la sauce « mortel ».

Cependant, nous ne sommes pas en présence d’un plagiat mais bien d’une production originale. Car la série ici présentée possède du bagage en matière de scénario, notamment grâce à une critique sociale cinglante des classes économiques en Corée du Sud. De bons acteurs, une intrigue bien troussée et une violence bien présente, le tout emballé dans un joli paquet noir avec un nœud rose.

Les personnages, comme à l’accoutumée des productions sud-coréennes, sont bien représentés et ont un background non négligeable. Seong Gi-hun, père de famille désabusé et, soyons honnête, flemmard au possible, doit trouver un moyen de redorer son blason auprès de sa fille et de son ex-femme avant que celle-ci ne parte avec son nouveau compagnon pour les Etats-Unis. Personnage à la fois complexe, misérable et déterminé, il porte une grande partie de la série sur ses épaules. Numéro 456 pour les intimes.

Pour le reste, nous avons une belle brochette de personnages ; Cho Sang-woo (Park Hae-soo), un financier ayant volé de l’argent à ses clients et ami de Seong Gi-hun (n° 218) ; Oh Il-nam (Yeong-Su oh), un vieil homme avec une tumeur au cerveau (n° 001) ; Kang Sae-byeok (Jung Ho-yeon), une transfuge nord-coréenne qui a besoin d’argent pour aider sa famille à passer la frontière (n° 067) ; Heo Sung-tae (Jang Deok-su), un gangster qui doit du pognon à un type pire que lui (n° 101) ; Abdul Ali (Anupam Tripathi), un pakistanais qui n’a pas été payé par son patron (n° 199) ; et Han Mi-nyeo (Kim Joo-ryoung), une femme un peu zinzin apparemment appâtée par les gains en jeu.

A noter également la présence de Lee Byung-hun dans le rôle du chef masqué, acteur que l’on retrouve en Storm Shadow dans G.I. Joe. Nous avons également Gong Yoo interprétant le recruteur et que l’on a pu croiser par le passé dans Dernier train pour Busan.

Ce qu’il faut préciser, c’est que nous avons une flopée de personnages et qu’en ce qui concerne les principaux, leur histoire est particulièrement développée. Il ne s’agit donc pas uniquement de chair à canon servant durant les jeux, la série mettant un point d’honneur à en faire des protagonistes à part entière, misant sur leurs personnalités, leurs espoirs, leurs doutes et leurs choix. Un beau taf’ d’acteur !

Squid Game prend son essence dans une mise en images de la lutte des classes comme avait pu le faire Battle Royale concernant le choc des générations. Ici, tous les participants sont démunis, n’ayant plus les moyens de rembourser leurs dettes. Leur proposer une alternative (même mortelle) afin de gagner 45,6 milliards de wons (un peu plus de 35 millions de francs suisses) permet de les faire entrer dans un piège sournois et violent. Je dis sournois car, effectivement, à aucun moment, les joueurs ne sont contraints de rester en jeu.

D’ailleurs, les jeux proposés ici sont bien trouvés et permettent une mise en tension tout à fait savoureuse lors de chaque partie. Le premier étant le célèbre « 1, 2, 3, Soleil », on ne peut que constater que les participants sont mal barrés et se retrouvent pris dans un engrenage sans pitié où il faut impérativement être le meilleur pour pouvoir survivre.

Les autres jeux sont connus dans nos contrées, si l’on excepte le coup du Dalgona Candy et du fameux jeu du calamar du titre. Quoiqu’il en soit, il s’agit de jeux pour enfants et donc, les règles sont facilement assimilables. N’empêche que risquer sa peau lors d’un concours de tir à la corde, ça a quand même une autre gueule que quand on le faisait dans la cour d’école.

On visionne donc les neuf épisodes sans déplaisir avant d’arriver vers un final rempli de surprises, du moins si l’on a réussi à éviter les nombreux spoilers présents sur la toile et également à ne pas connaître, sur le bout des doigts, les ficelles utilisées dans les films et les séries (non, une mort hors-champ ne veut absolument rien dire). C’est donc un spectacle à la fois saisissant, pertinent et violent qui nous attend.

Bien que les jeux mortels fassent mouche ces dernières années, il s’agit d’un spectacle explorant les aspects de la misère humaine avant toute chose. Jusqu’où est-on prêt à aller pour gagner suffisamment d’argent ? Les liens que l’on tisse avec les autres ont-ils donc toujours un sens ? A ce titre, le jeu des billes m’a carrément bluffé ; je vous laisse savourer.

Le microcosme dans lequel évolue les joueurs n’est que le pâle reflet de certains pans de notre société ; certains dictent les règles pendant que d’autres se tuent (littéralement) à la tâche dans le but d’avoir un avenir meilleur pour eux et leurs familles. Si l’on ne suit pas les règles, on est éliminé et l’on perd alors la possibilité de s’en sortir un jour. Au final, seuls les plus déterminés, les plus forts et les plus aguerris sont capables de s’en sortir. Gagner le gros lot, oui, mais est-ce que cela vaut les principes de nos vies ? Je vous laisse propre juge de ce que vous, vous auriez fait dans une situation similaire.

Petite précision ; ce n’est pas parce qu’une série propose un pitch mentionnant des jeux pour enfants… qu’il s’agit d’une série pour les enfants. Précision apportée en raison du nombre croissant de bambins qui s’amusent, dans leur cour de récré, à tabasser leurs petits camarades ayant perdu la partie à « 1, 2, 3, Soleil ». Parents, soyez vigilants.

En nous présentant des personnages attachants, des sujets pertinents et une violence bien sentie, Squid Game vaut clairement sa réputation. Il s’agit d’une production à la fois dérangeante et intéressante, nous plongeant non pas dans les jeux de notre enfance mais dans la psyché humaine et sa capacité de changement dans certains types de situations. Aucune saison deux de prévu pour le moment, mais retrouver le gagnant empêtré dans une nouvelle partie ne serait pas de refus. A ceux qui aiment les séries à suspense, les productions sud-coréennes et les bonbons au sucre, procédez au visionnage.

Et ceux qui connaissaient le jeu du calamar avant le visionnage, vous avez appris ça où ?

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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