Le soulèvement des souffre-douleurs

Si vous avez été persécutés à l’école, j’ai peut-être une solution pour vous ; The Final. Réalisé en 2010 par Joey Stewart (son seul long métrage) et écrit par Jason Kabolati, ce film retrace les terribles conséquences du harcèlement scolaire. Il y a fort à parier qu’un membre quelconque du film ait été la victime de tels agissements tant on peut y ressentir un plaisir dans l’accomplissement de la vengeance de nos jeunes torturés. Mais bon, la violence pour la violence, est-ce justifié ? Ne vont-ils pas trop loin ? Trop réaliste ou trop fictionnel ? On se prépare à affronter les caïds et on se lance dans la critique.

Sans arrêt harcelés par d’autres élèves, cinq d’entre eux décident de se venger une fois pour toutes des brimades subies depuis tant d’années. Ils organisent donc une soirée durant laquelle ils vont droguer tout le monde puis les faire participer à des jeux de plus en plus macabres dans le but de se venger et de marquer leurs tortionnaires à vie.

Le film démarre de manière peut commune, assez pour nous surprendre. Dans une scène en noir et blanc, une jeune fille débarque dans un restaurant pour y manger quelque chose. Défigurée, elle se fait dévisager (pas de jeu de mots…) par tous les clients avant de partir dans une terrible colère où elle précise qu’elle n’a pas demandé à être comme ça. On enclenche ensuite un flashback qui démarre l’histoire. 

Le postulat de base est on ne peut plus simple et on se trouve dans un pur film de vengeance. Cinq lycéens décident d’en finir avec le harcèlement dont ils sont victimes ; nous avons Dane (Marc Donato), le meneur, Emily (Lindsay Seidel), Andy (Travis Tedford), Jack (Eric Isenhower) et Ravi (Vincent Silochan). A force de se faire railler, frapper, qu’on pète leurs affaires et de se faire plaquer au mur tout en se faisant insulter, ils décident de passer à l’action.

A l’occasion d’une fête organisée par leurs soins, ils vont pouvoir opérer leur vengeance. L’appât fonctionne, tous les tyrans du lycée s’y rendent et les souffre-douleurs parviennent à les droguer à leur insu puis les attacher avec de solides chaînes dans la salle même de la fête. Ils se présentent ensuite masqués et le jeu macabre peut commencer avec une simple règle ; les tortionnaires ne mourront pas mais se souviendront à jamais de cette soirée.

On commence alors la parade des tortures pour chacun d’entre eux ; enfoncement d’aiguilles (avec un joli clin d’œil au terrible Audition de Takashi Miike), tartinage du visage avec une lotion acide, coupage de doigts et même défonçage de colonne vertébrale. Au niveau cruauté, on en a pour notre argent et on sent une réelle envie des persécutés de se venger mille fois ce qu’on leur a fait subir.

Concernant les acteurs… il y a deux écoles, si j’ose dire. Tout d’abord les souffre-douleurs. Mentionnés ci-dessus, ils jouent bien leurs rôles et se trouvent être intéressants dans leur développement, même si on ne comprend pas tout. Dane qui monte en puissance dans sa folie, OK, on capte, mais le fait que les autres continuent de le suivre malgré un incident tragique de son fait, c’est autre chose.

Mais ne tergiversons pas ; les rôles sont bien tenus, ce qui n’est pas le cas des tortionnaires pris au piège dans la salle. Même si la stupeur semble être de rigueur, alors que nous avons manifestement affaire à des clichés, notamment Bradley, le sportif, interprété par Justin Arnold, je ne vois pas bien l’intérêt de ne pas continuer sur la lancée. Alors que les souffre-douleurs se montrent plus théâtraux, on dirait que les autres se rapproche plus d’un réalisme qui se confond avec l’ambiance même du métrage.

Globalement, il faut le dire, seule Lindsay Seidel parvient à réellement nous coller quelques frissons, jouant admirablement son rôle de « cette fois, c’est moi qui tiens le couteau par le manche ! ». Même Kurtis, l’intrépide Jascha Washington, nous gratifie d’un très bon standard au début… pour devenir nettement moins convaincant par la suite. Pour le reste, on est soit dans le correct soit dans le critique. Les adultes présents dans le film ne sont pas en reste, étant loin de ce que l’on pouvait attendre d’eux.

Le scénario tient sur trois lignes… mais quelles lignes ! Enfin, si l’on prend l’idée de départ, on tient quelque chose d’intéressant ; jusqu’où pourrait-on aller pour se venger ? Le déferlement de violences et de tortures infligées aux tortionnaires est-il justifié ? La vengeance ne va-t-elle pas un peu trop loin ? C’est la question que veut poser le film en nous proposant une histoire de la sorte. Pourtant, si l’on prend en compte la phrase de la journaliste en fin de métrage, on pourrait croire qu’en fait, le harcèlement ne sera jamais considéré comme un potentiel crime.

Car c’est ici la base de tout ; le harcèlement scolaire. A force d’être brimés, brisés, raillés, disputés et rabaissés à longueur de temps, les cinq jeunes ont décidé de faire face à cela, à leur manière. Justifiés ou non, les actes de ces derniers posent au moins la question de savoir si le tortionnaire du tortionnaire à plus raison que l’autre. Pour cela, je vous laisse juge. Il est clair que suivant votre scolarité, votre avis peut clairement s’orienter d’un côté… ou de l’autre. Mais bon, pour les cinq ici présents, quelques sessions de psy n’auraient sans doute pas fait de mal.

De même pour le monteur du film ! On se retrouve dans un métrage qui parle d’un sujet pertinent avec des idées plein la tête… mais qui reste parfois incompréhensibles. C’est déjà qui les trois dans la forêt ? Non, parce qu’ils sont déguisés pareil que les autres. Et pourquoi ça finit comme ça ? Le plan n’était pas mieux rodé que ça ?

Dans les grandes lignes, en fouinant un peu, on découvre que plusieurs intrigues secondaires ont été sabrées et que cela donne un rendu final un peu brouillon où on tente de recoller les morceaux par l’ajout d’une phrase, comme si ça pouvait aider à la compréhension de plusieurs minutes d’intrigue inexistantes. C’est ainsi qu’on arrive à la fin du film avec l’impression d’avoir loupé quelque chose.

Osant s’attaquer à un sujet épineux et, malheureusement, toujours d’actualité, The Final n’est pas la solution adéquate aux problèmes scolaires. Surfant dangereusement sur les actes terribles commis dans des lycées en justifiant son existence par le fait de « ne pas tuer mais seulement mutiler », ce film ne sera pas impérissable comme les horribles séquelles laissées à plusieurs protagonistes. Il peut cependant faire remonter quelques souvenirs scolaires ainsi que le ressenti de l’époque par rapport à une injustice aujourd’hui passée. N’oublions pas que celui qui prépare une vengeance doit creuser deux tombes. Du coup, la vengeance se suffit-elle comme justification pour elle-même ? Parce qu’au final, torturer pour de bonnes raisons… ça reste de la torture.

Bon, fini de philosopher ; je vais me regarder à nouveau Class 1984. Là, en matière de harcèlement scolaire, c’est du lourd.

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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