Ce n'est pas du lol en hashtag

Le cyberharcèlement est un sujet bien actuel, et il l’était déjà en 2015, lors de la sortie de #Horror. Pour son premier long-métrage comme réalisatrice, Tara Subkoff s’attaque à du lourd, signant également le scénario. Eh bien oui, le sujet est délicat, d’actualité et en plus, il faut réussir à rendre le tout crédible. Lancer un message d’alerte pour prévenir les gens de la dangerosité de la chose tout en restant dans les clous, le pari est risqué. Est-ce que le film est une campagne de prévention ? L’horreur en hastag, est-ce possible ? Cela va-t-il changer les choses ? Pour parvenir à mettre en image un sujet comme celui-là, il vaut mieux avoir une bonne connexion. ATTENTION : cet article contient des spoilers

Une bande de six jeunes filles se retrouvent pour une soirée pyjama dans la maison de la privilégiée Sofia (Bridget McGarry) ; la timide Sam (Sadie Seelert), l’enveloppée Georgie (Emma Adler), la déstabilisée Cat (Haley Murphy), ainsi que Francesca (Mina Sundwall) et Ava (Blue Lindberg). La fête bat son plein, les participantes viscéralement accrochées à leurs téléphones portables pour poster les photos de leur soirée sur les réseaux sociaux. Mais lorsque Cat devient verbalement violente avec Georgie en la raillant sur son poids, Sofia la somme de partir. C’est l’élément déclencheur d’une soirée #horreur.

Parler du cyberharcèlement, c’est une bonne chose. Ce phénomène créé avec les communications facilitées et les réseaux sociaux a déjà fait beaucoup de mal. Pour illustrer cela, nous avons donc six filles totalement accros à leurs portables, ne parvenant pas à s’en détacher. La prestation de cette petite troupe est correcte, sans aller dans des élans stratosphériques, sentant parfois un peu l’hésitation. Il en est de même pour le rôle d’Alex (Chloë Sevigny), la mère de Sofia et d’Emma (Natasha Lyonne), une amie de la maman. Côté masculin, nous avons la présence flippante de Timothy Hutton interprétant le Dr. White, le père de Cat. Dans l’ensemble, ce n’est pas trop mal.

Ce qui frappe dans #Horror, c’est son montage, sans cesse entrecoupé d’images provenant de réseaux sociaux colorés, et agrémentées de textes violents. A l’image du cyberharcèlement, on peut dire des horreurs dans un environnement teinté de couleurs sympas et de sons d’alerte bonnards. Ces incursions visuelles viennent nous titiller et nous réveiller dans un scénario qui, sur le fond, se perd dans sa propre dénonciation. Mais j’y reviendrai.

Le film démarre fort avec deux morts au compteur. Des assassinats brutaux, sanglants, qui semblent donner le ton du film. Puis, on assiste à la présentation des filles. Sam, ne possédant pas les moyens financiers de ses amies, se sent un peu à l’écart. Cat semble avoir quelques problèmes de comportements et se fait remonter les bretelles par son paternel. Sofia, diva avant l’heure, reflète la cheffe de clan qu’il vaut mieux avoir comme amie.

Tout ce petit monde se retrouve pour une soirée pyjama d’anthologie qui va tourner au drame. Après une altercation violente entre Cat et les autres filles, cette dernière s’en ira seule dans la forêt, tentant désespérément d’appeler son père pour qu’il vienne la chercher. C’est là que les choses vont prendre une tournure sinistre, dans l’optique de dénoncer le cyberharcèlement.

Postant des messages violents à outrance au sujet de Georgie et de son petit problème de poids, Cat plombe littéralement la soirée des filles. Ces dernières, afin de ne plus être embêtées par les assauts horribles de leur « amie », décident d’enfermer les téléphones dans le coffre-fort de la maison et de jeter la clé. Elles vont alors se mettre à discuter entre elles et à enfin apprendre à mieux se connaître.

Mais un individu masqué rôde et pourchasse les filles, les tuant les unes après les autres. Tout cela finit dans un quiproquo des plus sanglants, amassant les morts et se rendant plus du côté du home-invasion que du film d’horreur dénonciateur. Cependant, il faut avouer que le final est un des moments les plus glauques du cinéma, de part sa violence mais aussi par la reprise de l’idée des réseaux sociaux, utilisée pendant tout le film, mais présentant cette fois-ci les motivations du meurtrier. Non, ce n’est pas lol.

Malgré ce final dévastateur à plus d’un titre, le scénario reste pantouflard, agrémentant son parcours de quelques scènes bien senties (la tension montante entre les filles, l’arrivée du père de Cat en pleine crise de colère, la révélation finale), mais ne parvenant pas à nous tenir en alerte sur toute la durée du métrage. Pour faire un raccourci ultime, on nous présente une soirée pyjama qui tourne au drame à cause du harcèlement d’une fille sur une autre, déclenchant les événements du film.

En utilisant le cyberharcèlement comme point central, la réalisatrice a une excellente idée. La dénonciation de ce procédé est une bonne chose, surtout quand on connaît l’ampleur qu’il prend aujourd’hui. Seulement, dans #Horror, cela n’est utilisé que pour justifier le home-invasion final et les tueries vues à l’écran. On veut dénoncer quelque chose qui va en fait être utilisé pour le bien-être du scénario. Heureusement, la fin, abrupte, violente et ultra-dérangeante, vient donner une cohérence à l’ensemble et permet à Tara Subkoff de ne pas se prendre entièrement les pieds dans le tapis, dénonçant tout de même le cyberharcèlement et ses conséquences gravissimes.

On peut aussi voir dans le film plusieurs problèmes sociétaux liés à la technologie, et notamment l’utilisation abusive de téléphones portables ou de réseaux sociaux. Les jeunes filles, droguées par leur mini-écrans, commencent à découvrir qui elles sont vraiment les unes pour les autres au moment où les portables ne sont plus là. Différentes classes sociales se retrouvent et pourtant, toutes possèdent un téléphone portable. Il s’agit donc d’un monde où tout se règle par écran interposé, souvent de manière violente. Il y a aussi la thématique du harcèlement qui se transpose en actes concrets, présentant jusqu’où ces dérives peuvent mener.

#Horror n’est pas foncièrement un bon film, mais il a le mérite (dans une certaine mesure), dans son traitement et dans son final, de nous présenter les terribles conséquences du cyberharcèlement. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’horreur ne se trouve pas dans les cabanes au milieu des bois et encore moins dans les fictions à la télé ; elle est là, présente sur les réseaux sociaux à tout instant. Je conseille donc ce film à ceux qui n’ont pas conscience de ce que le harcèlement en ligne peut engendrer et à tous les accros aux réseaux sociaux. Pour les autres, passez votre chemin et continuez d’utiliser vos hashtags à bon escient.

#cenestpasunecampagnedepreventionmaisonenestpasloin

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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