Des robots complètement à l'ouest

Michael Crichton, cela vous dit-il quelque chose ? L’auteur du roman Jurassic Park était, en plus d’un écrivain, un réalisateur. En 1973, il dirige le film Mondwest (Westworld en VO), narrant l’histoire de robots dans un parc d’attraction qui se détraquent et attaquent les touristes. Vingt ans plus tard, nous aurons droit à la même limonade, mais avec des dinosaures. Comme quoi les idées, ça s’en va… et ça revient. Pour en revenir à Mondwest, notre romancier signe ici sa première réalisation de long métrage. Des robots hi-tech dans un film de 1973, ça donne quoi ? Cela vaut-il le coup de prendre un billet d’entrée pour ce parc d’attraction ? La narration reste-t-elle pertinente encore aujourd’hui ? En selle ! 

Peter et John, deux hommes d’affaires, décident de passer quelques jours dans le parc d’attraction Delos. Ce dernier permet aux visiteurs de se retrouver dans diverses époques passées ; l’antiquité romaine, le Moyen-âge et le vieux Far West, usant de robots perfectionnés pour donner l’illusion d’un monde réel. Choisissant la conquête de l’Ouest comme destination, les deux amis vont passer de bons moments. Seulement, un problème technique dérègle les robots qui vont alors s’en prendre aux visiteurs. Peter et John seront alors traqués par un cow-boy mécanique particulièrement retors.

Peter est joué par Richard Benjamin. Ce dernier deviendra, dès 1982, un réalisateur ayant notamment à son actif J’ai épousé une extra-terrestre (1988) et Made in America (1993). Dans Mondwest, il campe le moustachu venant passer quelques jours à Delos pour s’y détendre. Sa représentation de l’indécis de service se prenant petit à petit au jeu est impeccable. A ses côtés, James Brolin (le papa de Josh Brolin) dans le rôle de John. L’acteur à la filmo cossue y joue un habitué du parc, presque blasé par ce que ce lieu a à offrir. Il aura pourtant quelques surprises durant ce voyage-ci. Face à eux, un robot en pétard prêt à en découdre joué par Yul Brynner. Les Dix Commandements, Les Sept Mercenaires, Pancho Villa, cet acteur de talent est passé par beaucoup de genres différents. Ici, c’est donc dans un cadre de science-fiction que nous le retrouvons pour notre plus grand plaisir, campant un des méchants les plus emblématiques du cinéma moderne. Peu de mots mais quel charisme ! Son look est repris de celui qu’il arborait dans le film Les Sept Mercenaires, et il faut dire que ça en jette.

Le film démarre habilement par un journaliste interviewant des vacanciers revenant de Delos. Filmé en format 4/3 pour donner l’impression d’un rendu TV, on y voit des gens follement heureux d’avoir participé à des duels à l’épée, pris du bon temps avec des femmes-robots et occis de la surface de la terre plusieurs personnes dont il est sans doute possible qu’il ne s’agissait pas d’êtres humains. Le nom de Delos (en grec « clair », « visible ») n’est pas un hasard vu qu’il s’agit d’une île grecque sur laquelle, selon la mythologie, seraient nés Apollon (dieu de la musique, de la poésie et de la lumière) et Artémis (déesse de la chasse), deux représentations qui seront grandement mises en avant dans Mondwest.

Le démarrage du film se fait sans peine. On nous explique comment fonctionnent les différents mondes de Delos via des vidéos explicatives et par le personnage de Peter, tout nouveau dans ce jeu de rôle grandeur nature. Une fois arrivé à destination, il est temps de mettre des vêtements de circonstance et de se rendre dans le lieu choisi, ici le Far West. Le scénario nous proposera de suivre également un autre personnage dans ces contrées (Dick Van Patten) et un visiteur jouant les chevaliers au Moyen-âge. Cependant, ces deux derniers resteront relativement en arrière plan et serviront plus de faire-valoir au reste de l’intrigue.

L’intrigue démarre relativement rapidement en insérant des passages se déroulant dans la salle de contrôle du parc. De là, les techniciens peuvent activer différentes parties des scénarios prévus pour les robots et ainsi donner vie à l’ambiance des différents territoires. C’est d’ailleurs ce qui arrivera à Peter et John. Le moustachu se faisant bousculer par un cow-boy dans un saloon, le dialogue qui s’ensuivra déclenchera un duel entre les deux hommes, remporté bien entendu par le visuteur, un système de sécurité ne permettant pas qu’un robot puisse faire du mal à un être humain, celui-ci s’en tirant donc toujours gagnant. Le cow-boy en question sera celui qui, par la suite, sera tenace au point de vouloir se venger de cet affront lors de ses passages suivants.

Car oui, à Delos, dès qu’un androïde est touché, on l’embarque pour la réparation et on le remet en fonction. Est-ce à cause de cela que tout va partir en vrille ? A un certain moment, les robots ne seront plus manipulables et donc en mesure de créer un véritable chaos, s’attaquant aux visiteurs du parc et les tuant les uns après les autres. Le cow-boy solitaire ne sera pas en reste et traquera alors sans relâche Peter et John.

Le scénario du film est bien ficelé, nous promenant quelques temps dans le parc pour mieux comprendre sa mécanique, et instaurant un règne de terreur des robots dans la seconde partie. Tout se suit de manière simple, la force du récit résidant dans les différents points symboliques que nous pourrons y retrouver (mais j’y reviendrai).

Les effets spéciaux sont de bon ton pour 1973, générant même une petite révolution à l’époque. L’entrepôt de réparation des robots n’a même rien perdu de sa superbe et le retirage de visage des androïdes reste, encore à l’heure actuelle, sacrément bien fichu. Du bon travail de ce côté-là, même si l’on peut encore terriblement ressentir les années 70, notamment lors des taches de sang consécutives aux duels. Mais en même temps, cela fait tout le charme du métrage, non ?

Comme explication à la débâcle du parc, nous aurons cela au détour d’une phrase d’un technicien, expliquant que les robots sont conçus à différents endroits et les pièces détachées assemblées à Delos. Il n’est donc pas possible pour les employés de savoir exactement avec quel matériel ils travaillent. Si l’inspection qualité savait cela, ils n’auraient sans doute pas pu ouvrir aussi facilement. Mais à 1'000 $ par jour et par visiteur, le profit prend le pli sur le danger.

L’attaque des robots se déroulera principalement via une poursuite entre Peter et le cow-boy dans le monde de l’Ouest, pour finir sur un duel sous tension avant un assaut final bienvenu. Le film se terminera donc sur l’image d’un homme qui pensait passer de merveilleuses vacances, mais qui n’en aura malheureusement que les miettes. S’il voulait de l’aventure, au moins, il aura été servi !

Revenons maintenant sur les différents points symboliques. Nous sommes en 1973 et la robotique est déjà quelque chose dont on parle beaucoup. En se projetant dans un futur relativement proche (1983 dans le film), il était possible de s’imaginer ce genre de parc sans pour autant avoir la possibilité de le concevoir. Aujourd’hui, serait-ce toujours aussi impossible ?

Ce qui revient également en avant, c’est le syndrome du complexe de Dieu. Les techniciens, ingénieurs, gérants et différents responsables du parc créés, de toutes pièces, des êtres pratiquement identiques aux humains. Ces créations n’ont pas pour but d’être éduquées, choyées et promises à un bel avenir, bien au contraire. Leur système est conçu pour obéir à des scénarios précis (déclencher des duels, coucher avec les visiteurs, simplement instaurer un réalisme, etc.). Les humains, dominant ces robots, sont alors tout-puissants au-dessus d’eux. Comme bien souvent, la créature finit par se retourner contre son créateur, scénario très présent dans l’univers cinématographique en général, représenté ici de manière futuriste et réaliste.

La confrontation du réel et de la fiction est également abordée dans le métrage. Le personnage de Peter ne sait plus vraiment ce qui est réel ou non, et se plonge donc complètement dans le jeu. Dubitatif sur le fait de tuer le cow-boy la première fois, il s’en réjouit la seconde et en devient même blasé avant le troisième duel. Comme quoi, une immersion trop profonde dans un univers fictif paraissant réel peut faire s’effondrer la limite entre réalité et fiction.

Pour en revenir à Apollon et Artémis, le premier est le dieu de la poésie, de la musique et de la lumière. Représentation ultime du cadre posé par la société Delos dans son parc. Les visiteurs y viennent pour y découvrir des paysages fabuleux et participer à des quêtes légendaires, tout en profitant de la musique (omniprésente dans le film), écrivant ainsi leur propre histoire. Poétique, n’est-ce pas ? C’était avant l’ouverture de la chasse aux humains par les robots, traquant les êtres organiques sans pitié. La représentation d’Artémis est alors toute trouvée. 

La désastreuse révolte des robots n’aurait sans doute pas eu lieu si les trois lois de la robotique d’Isaac Asimov (écrivain de science-fiction 1920-1992) avaient été introduites dans les systèmes. Dans le film, bien que les lois ne soient pas explicitement citées, l’on constate tout de même leur ombre sur le fil des événements lorsque les robots se mettent à griller quelques câbles. A noter également que ce film a inspiré des générations d’écrivains et de réalisateurs pour plusieurs métrages à venir. On ne peut s’empêcher de penser à Terminator et la révolte des machines contre les êtres humains. Et si avec Mondwest nous n’en étions qu’aux prémices ?

Fable futuriste intelligente, Mondwest nous propose le futur avec un film qui a maintenant… 44 ans ! Acteurs sympathiques, déroulement aisé, thématiques fournies, c’est un bon moment de cinéma qui a le mérite d’être un classique de la science-fiction. Conseillé à tous les amateurs de SF et aux aficionados des années 70, c’est une petite perle robotique dans un océan de réalisme.

A noter la faute de fou sur l'affiche du film !

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

Partagez cette page