L'horreur à domicile

Lors de la sortie d’un film d’horreur, on voit souvent la mention « Inspiré de faits réels », histoire d’appâter le spectateur plus facilement, créant une incidence avec la véracité des faits qui titille les bases mêmes de l’être humain. La majorité du temps, il s’agit d’esbroufe, d’effets marketing avérés, ne basant les films que sur une petite partie de l’histoire réelle et romançant la quasi-totalité des faits pour rendre la chose plus horrifique. Pourtant, il existe quelques métrages qui n’exagèrent pas et qui fonctionnent. On peut citer les récents Conjuring où, même si les histoires originales ont été remaniées, on assiste à un véritable spectacle de trouille. C’est également le cas de L’Emprise. Les faits se sont déroulés à Culver City, en Californie, durant l’année 1974. Doris Bither a été victime de plusieurs viols commis par des entités surnaturelles. Son histoire inspire Frank De Fellita qui sort un livre intitulé The Entity en 1978. Quatre ans plus tard, le film apparaît sur les écrans, réalisé par Sidney J. Furie, et la fiction rejoint la réalité dans un débordement inquiétant de scènes troublantes. ATTENTION : cet article contient des spoilers

Carla Moran (Barbara Hershey), élève seule ses trois enfants dans sa maison d’un petit quartier californien. Une nuit, elle se fait violemment agresser et violer par un assaillant invisible. Les semaines passent et les attaques continuent, la poussant à se rendre auprès d’un psychiatre, le Dr. Phil Sneiderman (Ron Silver). Ce dernier, convaincu que Carla est victime d’une maladie psychique, ne la croit pas. Elle se tourne alors vers des experts du paranormal pour tenter d’en finir avec ces terrifiantes agressions.

Barbara Hershey possède une filmographie fournie, tant en films qu’en séries. Elle a tourné avec certains grands (Woody Allen, Barry Levinson, Martin Scorsese) et son jeu d’actrice est indéniablement l’un des points forts du récit. Terrifiée mais restant une battante, on se met insidieusement à sa place, celle de la femme que personne ne croit. Ron Silver est un personnage ambigu dans sa relation avec sa patiente. Tantôt on le déteste, tantôt on se dit que son pragmatisme pourrait bien sauver des vies. David Labiosa joue le rôle de l’aîné des enfants de Carla, Billy, reflétant le grand frère protecteur de la famille. A noter que la scène de l’attaque dans le salon lui a coûté un bras cassé… tout comme le fils de Doris Bither lorsque l’assaut s’est véritablement produit.

Le casting possède des acteurs avec de la bouteille (George Coe, Margaret Blye, Allan Rich) et l’écriture des personnages est particulièrement réaliste, immergeant le spectateur de manière crédible dans cet enfer quotidien vécu par Carla. Autour d’elle, tous clament qu’il y a certainement un souci dans sa tête, jusqu’à ce qu’elle fasse la connaissance de deux experts en paranormal. Tout d’abord suspicieux, ces derniers ont bien vite la preuve que tout cela est réel.

Les premières scènes du film dépeignent le train-train de Carla, nous permettant de rapidement nous identifier au personnage. Métro-boulot-dodo comme diraient certains, engageant une monotonie qui est vite brisée par le premier assaut de l’entité. On suit alors les terribles attaques subies par Carla, son quotidien brisé, devant jongler entre le fait de conserver la force nécessaire pour apaiser ses enfants et celle lui permettant de rester en vie. Le standard de la vie est alors chamboulé et l’horreur s’invite à chaque instant.

Le scénario ne souffre donc d’aucun temps mort et nous plonge dans un univers troublant et inquiétant, relatant les attaques jour après jour et nous montrant les efforts surhumains de la jeune femme pour tenter de ne pas devenir complètement folle. Les psychiatres, persuadés qu’il s’agit ici d’une pathologie mentale, prennent le rôle des sceptiques, souhaitant que Carla se fasse interner volontairement. Les parapsychologues (en masse) viennent sauver la situation, mettant la jeune femme au centre de leur attention. Cependant, il est clairement visible que cela se fait dans le but de faire avancer la science, et non pas de sauver cette jeune femme avant que cela ne soit trop tard. Dans tous les cas de figure, Carla se retrouve seule face à cette terrible entité.

Le surnaturel suinte par tous les pores du métrage et les agressions de Carla sont particulièrement violentes. Un viol est déjà une chose horrible en soi, alors si vous ajoutez à cela le fait qu’il soit commis par des entités invisibles et surpuissantes (au nombre de trois), l’intensité des attaques est difficile à soutenir tant cela arrive de manière aléatoire et brutale. Ce métrage n’est donc clairement à ne pas mettre devant tous les yeux. L’atmosphère générale dérangeante mais l’attaque vue par le petit ami de Carla, Jerry (Alex Rocco), est saisissante et nous empêche carrément de reprendre notre respiration.

Dans une dernière scène particulièrement choquante, un texte à l’écran nous apprend que malgré le déménagement de Carla, les attaques n’ont jamais cessées. Doris Bither est décédée en 1995 et jusqu’à sa mort, même si cela arrivait moins régulièrement, l’entité ne l’aurait jamais laissée en paix. Une fin tout aussi terrible que le film en lui-même.

Car ici, mis à part la base d’inspiration bien fichue, on parle de l’histoire d’une femme qui se bat pour survivre face à un ennemi qu’elle ne connaît pas et qu’elle ne parvient pas à cerner. La seconde partie du métrage, un peu too much dans son déroulement (la copie de la maison dans un gymnase, la tentative des parapsychologues de stopper l’entité en la contenant dans de l’hélium), apporte cependant une émancipation de Carla, osant se dresser contre son assaillant en lui clamant qu’il ne peut plus lui faire de mal, du moins psychologiquement. Les gens autour d’elle savent que cela existe et, dans une certaine mesure, c’est ce qu’il fallait à Carla pour avoir le courage nécessaire de faire face à cette menace.

Avec tout cela, la réalisation reste correcte et même si certains passages ont été bien entendu romancés pour apporter de l’eau au moulin ; n’en reste que cette étrange histoire n’a jamais eu d’explication concrète. Dans la réalité comme dans le film, on reste simplement bouche bée devant cette horreur absolue, l’un des rares cas de poltergeist où des preuves concrètes ont pu aboutir à la conclusion que tout cela ne se passait pas dans la tête de la victime. Comme quoi l’horreur se trouve, aussi, dans la réalité. 

L’Emprise est un film radical et violent, psychologiquement troublant et fichtrement bien foutu. Les acteurs interprètent leurs rôles avec normalité, fractionnant clairement avec les événements atroces subis par Carla, toujours sous le coup d’une musique tonitruante et dérangeante, renforçant notre mal-être. Témoignage fictionnel tiré de faits réels, ce film est clairement à voir pour les aficionados de l’horreur, mais aussi pour ceux qui s’intéressent aux dossiers surnaturels existants bel et bien. Mais je le répète ; il n’est pas à mettre devant tous les yeux.

Un film de hantise qui met la barre plus haut, en somme.  

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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