La renaissance de DC ?

L’industrie DC Comics a une curieuse manière de gérer son univers cinématographique. Les critiques sont souvent en dents de scie, on rattrape certaines bourdes avec des versions director’s cut à double durée et on sent bien que ça tâtonne grave pour savoir dans quelle direction aller. Après l’abandon de tout ce qui était prévu et qui touchait au Dark Universe, voici qu’on nous annonce la sortie d’un nouveau Batman, sobrement intitulé The Batman. Ouaf ! La bonne blague !

Puis le projet avance, est remanié de nombreuses fois, passant de l’acteur principal Ben Affleck (officiellement le Batman du DCEU) à Robert Pattinson, nous faisant miroiter son appartenance à l’univers mis en place… pour finalement en faire un film indépendant. Bref, une production passablement changeante en cours de route, ce qui n’augurait rien de bon sur le fond. En basant son histoire sur des comics comme Year One (1987) ou encore The Long Halloween (1996), il semble que tout reparte à zéro.

Le film sort dans les salles et là, c’est la révélation ! Avec Matt Reeves à la réalisation (quand même le papa de Cloverfield, Let Me In et de deux opus de La Planète des singes), nous voilà avec un métrage qui tranche drastiquement par rapport aux précédents. Comment cela se fait-il ? Batman peut-il être transbahuté de la sorte ? Le Riddler peut-il porter autre chose qu’un pyjama vert fluo ? On prend sa voix la plus grave, on se dit intérieurement « Je suis Batman » et on se lance dans la critique ! ATTENTION : cet article contient des spoilers mentionnés par une balise

Gotham City. Une ville gangrénée par la criminalité, semblant s’enfoncer lentement mais sûrement dans les ténèbres, remplie de policiers corrompus et de tarés violents en tout genre. Pour contrer les malfrats les plus téméraires, une seule ligne de défense ; Batman. Souhaitant sauver la ville d’elle-même, le justicier va tout faire pour marquer la différence et montrer aux méchants qu’ils ne sont pas chez eux à Gotham. Est-ce que des pointures comme le Riddler ou le Pingouin seront d’accord de plier ?

Bien que l’on se trouve dans un film de super-héros, il faut préciser que l’esthétique est radicalement différente. Ici, tout est sombre, désespéré, violent et chaque sujet se traite d’abord à coups de poing avant de discuter. L’ambiance générale du film nous plonge dans un polar noir, plaquant son rythme sur celui de l’enquête minutieuse menée par Batman pour retrouver un terrifiant tueur en série énigmatique ; le Riddler.

A ce titre, Robert Pattinson arbore un Batman extrêmement convaincant contrairement à ce que l’on pouvait penser en entendant son nom pour la première fois. « Le type de Twilight dans un Batman ? T’es sérieux ? » ai-je demandé à l’époque en apprenant la nouvelle. Et pourtant, ça fonctionne très bien, l’acteur donnant au justicier ce qu’il faut de doute, de précipitation et d’humanité pour en faire un Batman extrêmement cohérent, utilisant les voyous de Gotham comme défouloir pour passer sa colère.

Le reste du casting est également à la pointe ; Zoë Kravitz sort les griffes pour nous offrir une Selina Kyle/Catwoman convaincante et cherchant abruptement à venger son amie, assassinée par la maffia locale ; Paul Dano interprète le Riddler, tueur en série terrifiant d’intelligence et de brutalité, avec un costume passablement glauque, renvoyant à un certain Machine dans 8 mm ; Colin Farrell est méconnaissable en Pingouin, caïd du coin qui excelle dans la vente d’armes, de narcotiques et de tout autre trafic faisable ; Jeffrey Wright campe un lieutenant James Gordon droit dans ses bottes et travaillant de concert avec Batman, conscient que ce dernier est un des rares espoirs de Gotham ; et Andy Serkis en précieux allié de Bruce Wayne, interprétant son majordome et ami, Alfred.

Il ne faut pas oublier John Turturro qui a quitté son secteur 7 de Transformers pour jouer les Carmine Falcone violent et sans concession ; Peter Sarsgaard en procureur corrompu ; et un certain Barry Keoghan qui vient titiller nos neurones de geek avec une apparition surprise en fin de métrage.  

Non, sans déconner, le casting fonctionne du tonnerre et c’est un véritable plaisir de voir tous ces acteurs déambuler à l’écran, chacun ayant l’air non seulement de prendre plaisir à l’expérience mais également de donner le meilleur de lui-même pour nous embarquer dans cette nouvelle aventure.

D’ailleurs, celle-ci vaut également le détour. En planifiant une histoire plus posée et plus sombre, Matt Reeves (également au scénario avec Peter Craig) développe un aspect du personnage que l’on avait peu vu dans les précédents métrages éponymes. Le côté détective est ici décuplé, de même que la partie « brisée » du justicier, n’étant pas en mesure d’empêcher de terribles événements de survenir.

Cependant, je vous rassure ; ce n’est pas pour autant que le film est plat. Les intrigues à ressort sont habilement huilées et il ne faut pas oublier plusieurs scènes d’action qui viennent ponctuer le tout. Du fracassage en règle de vilains, une castagne finale rafraîchissante ou une course contre la montre désespérée, rien n’est laissé au hasard. A ce titre, une scène de course-poursuite entre la Batmobile (franchement classe !) et le Pingouin peut se targuer de nous coller à notre siège, faisant sans doute de celle-ci l’une des meilleures poursuites du cinéma. Même Edgar Wright (la trilogie Cornetto, Baby Driver) a été bluffé.

La psychologie des personnages est également extrêmement bien développée, celle de Bruce Wayne/Batman en tête. Convaincu d’être le bras vengeur de Gotham et souhaitant « nettoyer » la ville de ses mauvais éléments, le fil du récit développe la cruelle question que se pose le justicier ; est-ce que je suis capable de changer quelque chose ? Réponse durant le film et je dois bien avouer que l’épilogue de ce questionnement offre de bonnes perspectives d’évolution pour les potentielles suites.

Nous avons donc un métrage bien structuré, bien réalisé, bien rythmé, bien interprété et bien développé. Est-ce également le cas pour son dénouement ? Eh bien oui ! Et c’est là, chers fans de ciné, que je place une balise SPOILERS pour ceux qui ne veulent pas connaître l’issue du film avant de l’avoir vu.

ATTENTION : SPOILERS A PARTIR DE CE POINT

Car à la fin du film, le Riddler, enfermé à Arkham, fait la connaissance d’un autre personnage iconique de l’univers DC ; un certain… Joker. Crédité uniquement comme « Unseen Arkham Prisoner », nul doute que le clown prince du crime se trouve être le voisin de cellule de notre Riddler nouvellement créé.

Si l’on rajoute à cela le site Internet furtivement présenté en toute fin de générique (celui mentionné également dans le film dont je vous mets le lien ici : https://www.rataalada.com/), il y a lieu de penser à plusieurs théories pour les suites qui devraient voir le jour. Cette manière de procéder me fait penser à tout ce qui se tramait autour de The Dark Knight de Christopher Nolan au moment de sa sortie.

Pour la suite, on peut notamment citer, bien entendu, l’arrivée du Joker, mais aussi celle d’un certain Thomas Elliot alias Hush (« Silence » en VF), représenté notamment dans le site susmentionné et ayant apparemment un parent durant le métrage. Et vu que le procureur Colson s’est fait refroidir pendant le film, qui pourrait bien prendre sa place ? Serait-ce possible que ce soit Harvey Dent, également connu plus tard sous le nom de Double-Face ? Dans tous les cas, les possibilités sont nombreuses pour la suite.

FIN DE LA SECTION SPOILERS

Mais en fait, que va devenir cet univers cinématographique ? Avec un film plus sombre, DC Comics illumine son avenir. Avec les nombreuses possibilités en place, il faut également mentionner des suites qui sont prévues ainsi que deux séries spin-off (celle sur le Pingouin est commandée ; l’autre se concentrerait sur… l’asile d’Arkham). De quoi donner du baume au cœur aux fans et leur faire attendre avec impatience la suite des événements.   

Bon, je passerai volontiers sur quelques détails qui m’ont légèrement chiffonné, notamment une surinterprétation du Riddler dans sa phase finale, me faisant cruellement penser à la crise de folie tout sauf passagère dont souffrait Jim Carrey dans le même rôle ainsi que son comparse de l’époque, Double-Face, interprété par Tommy Lee Jones. De manière personnelle, la meilleure vision du Riddler que j’ai eu jusqu’à maintenant est celle présentée dans les jeux Batman Arkham qui restent, pour moi, une référence en matière d’écriture de personnages. Mais là, vu que ce sont les origines du Riddler, je chipote.

Dans l’ensemble, ce nouveau Batman est une réussite pleine et entière, nous prouvant que DC Comics peut faire les choses bien, voire excellemment bien ! Depuis le début de la création des univers cinématographiques entre DC Comics et Marvel, le premier nommé voulait nous montrer quelque chose de différent, de plus sombre, de plus viscéral, à l’image de la différence entre les deux maisons de comics. C’est chose faite avec ce film.

The Batman envoie du lourd… et c’est peu dire ! Les fans de l’homme chauve-souris ne se sentiront pas lésés, les amateurs de films sombre goûteront goulûment à l’histoire et les aficionados de cinéma ne pourront qu’apprécier cette réalisation bien menée et terriblement humaine, nous présentant le justicier comme rarement nous l’avons vu. Impatient de découvrir ce que l’avenir nous réserve car il reste encore tant à faire… et si peu de temps.

Pas vrai, Joker ?

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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