Diablement sympa

Quelques fois, en grattant un peu la surface, on trouve des trucs franchement bonnards. C’est le cas de la série Diablero parue sur Netflix en décembre 2018. Produite par Morena Films, une firme mexicaine, et créée par Pablo Tébar et José Manuel Cravioto, l’histoire est tirée du livre El Diablo me obligó de l’écrivain mexicain Francisco Haghenbeck. On nous parle de chasseurs de démons, d’une équipe pour le moins éclectique et d’une potentielle fin du monde. Connaissant donc l’origine de la série et son potentiel, je ne pouvais pas passer à côté. Et franchement, après le visionnage, je n’ai pas été déçu. Vous êtes prêt pour une petite chasse ? ATTENTION : cet article contient des spoilers

Le Père Ramiro Ventura (Christopher von Uckermann) vient à peine d’apprendre l’existence de sa fille que cette dernière se fait kidnapper par un démon. Pour la retrouver, il fait appel à un Diablero nommé Elvis Infante (Horacio Garcia Rojas) aidé par sa sœur Keta (Fatima Molina). L’équipe ne serait pas au complet sans la présence de la protégée d’Elvis, Nancy (Gisselle Kuri), une jeune femme aux étranges pouvoirs. Ensemble, ils vont tenter de retrouver la fille du Père Ventura… et accessoirement empêcher la fin du monde.

On commence par la présentation des personnages. Ces derniers sont hauts en couleur et méritent que l’on s’y attarde. Car contrairement à d’autres séries qui effleurent seulement la surface de leurs protagonistes, là, on se jette carrément à l’eau. Grâce à des flashbacks judicieusement placés durant les épisodes, on en apprend plus sur chacun d’eux, leur donnant non seulement de la consistance mais développant également notre empathie à leur égard.

Elvis est le fer de lance de l’équipe. Une dégaine à toute épreuve, un franc-parler viscéral et une histoire de famille peu banale font de lui le type idéal pour porter le titre de Diablero. Soucieux de son porte-monnaie mais sachant tout de même faire le bien gratuitement lorsque cela est nécessaire, son rôle est déterminant et sympathique d’un bout à l’autre. Sa sœur Keta est un peu plus effacée dans les premiers épisodes mais prend en importance par la suite. Dans la tradition des Diableros, il n’y a que des hommes. Les femmes, les Diableras, sont plus proches des sorcières que des chasseuses de démon. Pourtant, Keta semble avoir quelques prédispositions pour devenir un atout majeur de l’équipe. L’un comme l’autre ont une histoire de famille assez tragique avec la perte de l’enfant de Keta, lui aussi apparemment kidnappé par une force démoniaque. De quoi étoffer un peu plus la mythologie de la série.

Puis, il y a le Père Ramiro Ventura qui a eu une fille avant d’entrer dans les ordres. Il ne l’a jamais connue et n’apprend son existence qu’au moment de sa disparition. Désabusé dans ses convictions, il est le déclencheur de toute cette histoire et va apprendre à ses dépens comment cela se passe dans le monde de la chasse aux démons. Et nous avons la sublissime Nancy. Personnage qui m’a le plus surpris lors de cette première saison, cette jeune femme a la capacité de faire appel à des démons pour se faire posséder et ainsi décupler sa force lorsque cela est nécessaire. Intéressante et mignonne, elle apporte une touche flirtant avec la super héroïne sombre et torturée, idéale pour compléter l’équipe de la série.  

Humberto Busto est Isaac, ex de Keta et trafiquant de démons, qui pourrait être un allié précieux s’il n’était pas aussi impulsif ; Mama Chabela, interprétée par Dolores Heredia, est la protectrice des enfants kidnappés ; Flavio Medina est le Cardinal Morelo qui n’est pas étranger à tout ce qui arrive de bizarre dans le secteur ; et Takahiro Murokawa est Song, un genre de prêteur sur gage spécialisé dans les objets occultes.

La profondeur de l’écriture des personnages est une force pour la série. On ne se contente pas de balancer des protagonistes à la face du spectateur ; on raconte leur origine et on explique leur comportement. Par exemple Isaac, hyper-impulsif voire carrément violent, possède un développement qui nous explique le pourquoi du comment, donnant ainsi du corps au personnage… et à l’histoire. A mentionner que le pauvre subira un sort de retour à l’enfance pas banal.

Tous les acteurs semblent s’éclater sur le tournage. Elvis possède ce charisme si particulier qui en fait clairement une icône de la série, tout comme Nancy qui joue admirablement bien les scènes de possession à tel point que j’ai trouvé cela plus impressionnant et crédible que la plupart des métrages sur le sujet que j’ai pu voir ces dernières années. Dans l’ensemble, tout concorde.

Côté histoire, on ne s’ennuie pas non plus. Le scénario suit son fil depuis la disparition de Paulina à l’apogée du dernier épisode en passant par la création de l’équipe et la découverte du monde des Diableros. C’est là un des autres points forts de la série ; sa mythologie. Ici, on exorcise les démons et on les enferme dans une bouteille, tels des génies maléfiques qu’il faut confiner. On se retrouve alors avec une scène durant laquelle des combats de démons sont organisés par Isaac, un sommeiller passant avec son chariot de bouteilles afin de pouvoir choisir avec quel démon les combattants vont être possédés.

Les ennemis sont catégorisés par palier et plus le niveau est élevé, plus le démon est dur à exorciser. Un point crucial si l’on prend en compte que Nancy peut se faire posséder par des « petits » démons et s’en débarrasser elle-même, ce qui n’est pas le cas si le monstre est plus puissant. Le comble est que la petite équipe doit se dresser contre un prince démoniaque que l’on pourrait assimiler à un dieu dans d’autres cultures. Rien que ça !

Diablero possède encore un autre atout dans sa manche ; son influence de l’Amérique Latine. Exit les procédures connues et reconnues du domaine horrifique que l’on peut trouver dans notre culture occidentalisée à outrance. Ici, c’est le Mexique et les règles sont différentes, tout comme les paysages et les modes de pensée. Voir se dérouler une histoire comme celle-ci dans un cadre tel que celui-là, ça fait un bien énorme et permet un dépaysement extrêmement bienvenu.

Vous allez me dire ; au fond, il y a bien quelque chose qui cloche, non ? Eh bien la série n’est effectivement pas exempte de quelques défauts qui ne péjorent heureusement pas le visionnage de celle-ci. Les effets spéciaux par exemple. Si les maquillages sont totalement bluffant (possession de Nancy, monstres en tout genre), il n’en va pas de même des quelques effets de synthèses parsemés dans la série qui cassent un peu le rythme. Pourtant, cela est totalement excusé dans le sens où il s’agit tout de même d’une firme mexicaine qui gère l’affaire et qui, finalement, s’en tire bien.

Il y a aussi un modeste décalage que l’on pourrait souligner. Je m’explique. On se retrouve dans une série atypique où le fun et les blagues cocasses côtoient sans temps mort une histoire dramatique et des faits atroces. On peut donc passer d’une situation drôlesque à un moment d’émotion intense en quelques secondes, ce qui pourrait dérouter certaines fois. Typiquement, le comportement d’Elvis change passablement d’épisode en épisode, sans pour autant que cela pète la cohérence mise en place dans la série. Cependant, vu que l’on note quand même le changement, je pense important de le préciser.

On parle de famille, de traditions, de lien entre individus. Intéressant dès lors de constater que notre ami prêtre va s’amouracher quelque peu de la belle Nancy, elle-même étant un aimant à démons. Il en va de même pour la relation apparemment complexe entre Isaac et Keta qui nous est présenté en toute fin de saison, la jeune femme balançant clairement à son ex ce qu’elle pense de la situation. Est-ce que cela découlera prochainement sur un potentiel problème ou est-ce juste là une pirouette gaguesque pour nous bluffer ?

Les liens de famille sont plus forts que tout et c’est ce qui est clairement démontré dans le dernier épisode où le père d’Elvis et Keta revient pour les aider dans le combat, tout comme les deux filles d’Isaac venant prêter main forte à leur père. Tout cela baignant dans une atmosphère latine rafraîchissante, il n’en fallait pas plus pour que la série puisse se constituer un univers à part entière et une identité propre.

La série ne sombre pas dans un débit de gore ni dans un trop plein de sursauts. Elle reste relativement posée en marquant principalement ses scènes avec une photographie et un jeu de caméra bien foutu. La première apparition de Nancy est un excellent exemple, permettant au spectateur de se faire une idée de la conduite de la série au niveau horrifique. Typiquement, le fait de voir la véritable forme des démons par l’intermédiaire des miroirs est une excellente idée, notamment lors des combats organisés par Isaac. 

Avec huit épisodes de 35 à 45 minutes, la série se dévore d’un bout à l’autre sans aucune peine. Chaque fin d’épisode appelle le suivant et on a envie de découvrir ce monde des Diableros dans les moindres détails. Même si certaines explications ne sont pas pleinement satisfaisantes notamment concernant le classement des démons ou encore les procédés utilisés par les Diableros, on se doute bien que la saison deux apportera son lot de réponses. Surtout que la fin de cette première partie nous bluffe quelque peu dans ses dernières images.

Excellente surprise que ce Diablero ! Des personnages intéressants et travaillés, du fun avec une dose de délire, une histoire atypique alliant chasse aux démons et mésaventures familiales dramatiques, cette série ravira les amateurs d’intrigues tournant autour de la possession et des mythologies peu communes. Ne faites pas de chichi, prenez un billet pour le Mexique et lancez-vous dans le visionnage de Diablero ; le voyage, à mon avis, vaut le détour.

Et emportez quelques bouteilles vides avec vous, au cas où.  

Commentaires

Keyshira

19.02.2020 06:21

Juste comme ça dans la série c'est mentionné qu'à moitié, comment on classifie les démons? Les 2 sont plus puissant que les 3 et les 7 sont surpuissant plus que les 2 et 3 ,y'as de quoi se mélanger !

Critiker

19.02.2020 19:11

Très juste ! On ne sait pas grand-chose de cette classification. Nancy pose la question à Elvis en début de saison 2... mais la réponse est vite expédiée. Espérons des précisions pour la suite !

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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