C'est dans la boîte !

Les films de possession sont souvent redondants, reprenant la même trame afin de conserver le spectateur dans un axe habituel. Depuis la sortie de L’Exorciste en 1973, le constat est connu, parfois renouvelé, mais souvent décevant. Et puis, en 2012 arrive Possédée, un film qui parle aussi de possession mais d’un côté un peu… différent. Pour réaliser ce métrage, on demande à Ole Bornedal de se mettre derrière la caméra. Le Danois est déjà au fait d’avoir réalisé Le Veilleur de nuit dans les deux versions (danoise et américaine). Ici, il a la lourde tâche de mettre en boîte une histoire de famille brisée, de possession et de démon coincé dans un coffret. Pour gratiner le tout, nous avons Sam Raimi à la production, le tout sous couvert de Ghost House Picture. Conventionnel ou affichant un vent de renouveau ? Seul un visionnage pourra en décider. ATTENTION : cet article contient des spoilers

Clyde (Jeffrey Dean Morgan) et Stephanie (Kyra Sedgwick) sont divorcés. Leur entente encore cordiale permet à leurs filles Hannah (Madison Davenport) et Emily (Natasha Calis) de voir leur père régulièrement. Lors d’un week-end chez ce dernier, ils se rendent tous dans un vide-grenier où la jeune Emily tombe sous le charme d’une étrange boîte. La ramenant chez son père, elle va développement lentement mais sûrement un comportement de plus en plus étrange. Se pourrait-il que la boîte puisse contenir un dibbouk, un puissant démon se nourrissant de l’âme du propriétaire du coffret ?

Déjà, on part sur un postulat hyper connu ; un objet maudit déclenche un cas de possession chez une jeune fille. De plus, l’histoire se dit tirée de faits réels qui se seraient déroulés à Portland entre 2001 et 2003. On pourrait dès lors se dire que tout est fichu et que les choses ne peuvent pas sortir de la sacro-sainte ligne droite établie par un scénario rodé. Et pourtant, même si l’on se retrouve en territoire connu, le scénario n’en reste pas moins intéressant.  

Tout d’abord grâce à des acteurs qui sont dans leurs rôles et qui font ce qui leur est demandé, Jeffrey Dean Morgan en première ligne. Père de famille perturbé par son divorce, souhaitant conserver l’amour de ses enfants, il va se battre bec et ongle pour réussir à sauver sa petite fille d’une force maléfique. Son ex-épouse, interprétée par Kyra Sedgwick, est aussi sur la même longueur d’onde, se rendant compte au fur et à mesure que quelque chose cloche réellement avec sa progéniture.

Nous retrouvons aussi Madison Davenport dans le rôle d’Hannah qui assiste impuissamment aux changements terribles de sa petite sœur Emily. Celle-ci est campée par la jeune Natasha Calis, admirablement dans le ton de son personnage, à la fois touchant et terrifiant. On note aussi la présence fortement sympathique de Matisyahu dans le rôle de Tzadok. Cet artiste de reggea basant ses paroles sur sa religion (judaïsme hassidique) est donc tout trouvé pour être le fils d’un rabbin qui vient en aide à la famille de Clyde.

Les personnages sont donc facilement reconnaissables et possèdent des caractéristiques propres devant un but commun ; sauver la petite Emily des forces du mal qui accaparent son corps. Pas d’immense profondeur historique de chacun des persos (même si, par exemple, le déclencheur du divorce par l’intermédiaire du travail de Clyde est en toile de fond) mais on sent que la direction est bonne.

Et côté scénario pur jus, ça se passe comment ? Eh bien, comme dit plus haut, Possédée surfe sur tous les films post-Exorciste connus, calquant son genre sur ces derniers en tentant de faire quelque chose de nouveau. On peut dès lors trouver intéressant l’utilisation de la tradition juive dans le film notamment par la présence de la boîte à dibbouk. Ce type de coffret aurait été utilisé à maintes reprises par le passé pour enfermer un démon à l’intérieur, l’empêchant de venir souiller des âmes humaines… pour autant que le contenant ne soit pas ouvert.

Comme dans moult films, ce qui doit arriver arrive ; la boîte est ouverte par la jeune Emily qui va alors passer par plusieurs phases de changements. La prise de conscience du père, les événements coïncidant avec son divorce, les stratagèmes du démon, tout cela vient apporter un peu de gratin sur le dessus pour donner plus de consistance au métrage.

Puis vient la scène de l’exorcisme final qui, il faut le dire, dépote plus que dans la majorité des films de genre. Ça bouillonne, ça crie, ça propulse contre les murs, ça se cache dans le noir, le contexte en entier met une tension non négligeable qui ne fait que s’accroître au fil des minutes. On pourrait reprocher à la scène en question d’être terriblement courte par rapport à ce qui pouvait être attendu, mais ça fonctionne malgré tout. Tout cela pour en arriver à un final bienheureux pour certains… et terrible pour d’autres.

Bien que les apparitions d’Emily possédée soient bien fichues et que quelques jump-scares sont à mentionner, le film n’a cependant pas de quoi nous faire réellement décoller de notre canapé. Outre le contexte et l’idée de base, nous nous trouvons bien dans un film de possession, usant de tous les standards déjà connus par le passé ; aspect physique changeant (yeux, couleur de cheveux, de peau), hurlements inhumains et voix grave, ricanements incongrus du démon ainsi que ses multiples stratégies. Nous sommes en terrain connu concernant les potentielles scènes de trouille et sur ce point, le film reste relativement gentillet.

Par exemple, une des affiches du film nous présentait Emily en train de cracher des centaines de papillons de nuit. La scène est bien présente dans le film (et les papillons ont clairement une gueule qui n’inspire pas confiance), mais elle manque de consistance et de tension. Il en est de même pour pratiquement tout ce qui se passe avant cette fameuse scène, moment charnière qui déclenche la possession à proprement parler.

Mais quelques moments viennent tout de même titiller nos rétines et ouvrir grandes nos mirettes ; le triste destin du dentiste des environs, l’attaque de la prof d’école et bien entendu l’exorcisme final et son jeu de cache-cache court mais prenant. Ces instants ponctuent le métrage de manière à ce que l’on soit en mesure de ne pas complètement s’ennuyer du côté de la peur. C’est déjà ça. Et notons tout de même la grande sortie du démon du film et sa tronche abominable qui permet d’avoir une vague notion de ce que « terrifiant » veut dire. 

Les thèmes du film sont ceux traditionnellement usités dans les métrages de ce type ; la famille. Ici, un homme et une femme divorcent laissant une principale partie de la peine à leurs filles. Du coup, la possession d’Emily pourrait être transposée comme étant un changement d’état durant cette période pénible, ne trouvant le salut que dans l’aide apportée par une tierce personne pour finalement s’en sortir. Ce n’est qu’après avoir vécu de rudes épreuves que la famille pourra se retrouver et ainsi sortir grandie de ces moments de doute et de terreur.  

Possédée possède (notez l’utilisation extrêmement recherchée de ces deux mots) tout de même de bons arguments. Avec des acteurs sympathiques et dans le tir ainsi qu’une idée de base mettant en avant la tradition juive, on passe l’intégralité du métrage à le suivre sans trop de peine. On n’a pourtant pas vraiment peur et lorsque le générique final démarre, on est partagé entre la joie d’avoir vu un film sortant un tant soit peu des sentiers battus et la tristesse de constater qu’il y avait peut-être d’autres manières de nous présenter cela. Malgré son rendu final mitigé, le film plaira aux aficionados du genre et à tous ceux qui ont chez eux une étrange boîte avec des gravures autour.

D’ailleurs, depuis que je l’ai achetée, je me demande ce qu’il y a à l’intérieur…  

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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