Illogisme moderne

Sir Arthur Conan Doyle, par l’intermédiaire de son personnage-clé Sherlock Holmes, disait que lorsque nous avons éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est forcément la vérité. La vérité, c’est que le détective londonien à le vent en poupe depuis plusieurs années ; Sherlock Holmes de Guy Ritchie (2009) et sa suite Jeu d’ombres (2011) ; la série Sherlock depuis 2010 ; Elementary depuis 2012 ; Enola Holmes d’Harry Bradbeer (2020) ; le personnage plaît et se laisse décliner de plusieurs manières. Donc, en 2021, Tom Bidwell créé la série Les Irréguliers de Baker Street disponible sur la plateforme Netflix. Coup de génie ? L’enquête va-t-elle conclure à un acte volontaire ? Comment faire une bonne série en 2021 ? On chausse son deerstalker et on se lance dans la critique ! ATTENTION : cet article contient des spoilers

Au 19ème siècle, dans les rues de Londres, une bande d’ados tente tant bien que mal de survivre. Bea (Thaddea Graham) se fait du souci pour sa sœur Jessie (Darci Shaw) en proie à de terribles cauchemars. Des événements étranges se déroulent dans la capitale et c’est alors qu’apparaît un certain Watson (Royce Pierreson), Docteur de son état, demandant de l’aide à cette petite bande pour résoudre des mystères pour le moins… mystérieux.

Les Irréguliers ne sortent pas de nulle part ; ils existent bel et bien dans le canon des aventures de Sherlock Holmes, ce dernier demandant de l’aide aux gamins des rues de Londres moyennant rétribution. Peu présents dans ce qui a été adapté jusqu’ici, je me suis dit que ce n’était pas une mauvaise idée de mettre en avant ce groupe qui permet tout de même au détective en chef de résoudre plusieurs affaires. Avais-je raison de m’en réjouir ?

On démarre cette nouvelle série avec la présentation des personnages principaux, majoritairement faisant leurs premières armes. Nous avons Bea, grande sœur protectrice et confiante ; Jessie, plus jeune et possédant apparemment un don hors du commun ; Billy (Jojo Macari), la force de frappe du groupe ; Spike (McKell David), le joyeux drille de la bande ; et l’arrivée impromptue de Leopold (Harrison Osterfield). Ce dernier, prince de son état et personnage historique de surcroît, est atteint d’hémophilie, ce qui le freine un peu dans sa volonté d’une vie trépidante.

Tout ce petit groupe fonctionne relativement bien même si le jeu est parfois un peu bancal. Mais on se prend volontiers à l’histoire et on avance gentiment au gré des huit épisodes… pour se rendre compte que plus on avance, plus on se demande réellement ce qui a pu se passer.

L’intrigue centrale suit l’enquête de Watson sur les événements surnaturels se produisant à Londres. La raison : l’ouverture d’une brèche vers l’au-delà. Bien que les premiers épisodes arrivent à instaurer un certain intérêt pour cet aspect paranormal (attaques d’oiseaux, rituels de magie noire, ambiance obscure) et que les enquêtes sont passablement glauques (on parle de fugue, d’enfants battus, de viols, tout ça, tout ça), n’en reste que dans la présente série, ça ne fonctionne pas des masses.

Les histoires de Sherlock Holmes ont toujours eu un côté surnaturel, l’enquêteur se dressant face à des énigmes pratiquement insolubles et arrivant toujours, sur un point de détail, à tout résoudre. Mais là, on ne fait plus dans la subtilité ; ça envoie du steak paranormal à tout-va sans prendre de gants, allant même jusqu’à un chaos ultime dans les rues de Londres, certes bien prenant mais totalement à côté de la plaque.

Et que dire des personnages iconiques présents dans cette série, à savoir le Dr. Watson et Sherlock Holmes (Henry Lloyd-Hughes) ? Le premier semble clairement manquer de consistance pour convaincre et le second n’est que l’ombre d’un carton recyclé ressemblant étrangement au fameux détective. Aucun des deux ne parvient à attirer un quelconque intérêt au spectateur. L’empathie globale envers l’intégralité des personnages est sérieusement entachée et on s’étonne de prendre le parti de certains antagonistes, Arthur Hilton en tête, interprété par le très bon Rory « Clegane » McCann.

En parlant d’antagoniste, ça donne quoi à ce niveau-là ? Eh bien, quelques bonnes idées traînent çà-et-là dans cette première saison ; un contrôleur d’oiseaux aux motivations tragiques, une fée des dents assez flippante, une changeuse d’apparence à l’histoire bien glauque… mais il y a aussi des éclats moins brillants, comme la Poison Ivy du pauvre ou encore le « méchant » principal. Avec un charisme proche de celui d’une lavette de salle de bain, le traitement de ce personnage ne permet en aucun cas de le voir comme une menace. C’est con ; son pouvoir aurait pu être source de bien des sursauts.

Les intrigues, secondaires ou principales, n’apportent aucune surprise ; Jessie est spéciale ? On le savait ; La mère de Bea et Jessie connaissait les gulus du 221B ? Logique ; Le gentil Monsieur en Louisiane est en fait méchant ? Nooooon ? Sérieux ? ; Watson en pince pour Holmes ? Comme si ce n’était pas évident ; Leopold et Billy vont devenir potes ? On s’en fiche ; Leopold emballe Bea au détriment de Billy mais doit suivre la voie de la royauté et s’en aller ? Non, mais on s’en fiche vraiment, j’ai dit !

La seule, l’UNIQUE question qui reste en suspens… le restera. Même en toute fin de saison, on ne revient pas sur la mystérieuse identité du fils de l’homme en blanc, ne serait-ce que pour nous donner envie de voir la suite. Bien que les candidats ne soient actuellement pas légion, cela aurait au moins pu apporter un peu d’intérêt dans le but de visionner la suite.

Est-ce que l’on pourrait résumer la situation en disant que rien ne va dans cette série ? Oui, car il n’y pas d’intérêt pour les personnages, on se fiche de l’intrigue, on n’est surpris de rien et certains effets spéciaux laissent parfois pantois. Pourtant, il y avait un potentiel, non seulement au niveau de l’histoire mais également sur le background des personnages qui semble ici n’être que survolé ou écrit à la ramasse.

Et c’est exactement l’impression que donne la série ; on prend du « Sherlock Holmes » pour faire bien, on saupoudre (merde, la salière a pété !) de surnaturel pour attirer les aficionados du genre et on empaquète ça vite fait sur une plateforme de streaming pour vite faire un maximum d’audience. Malheureusement, ce n’est pas comme la cabine du Docteur Who ; ici, c’est bien plus petit à l’intérieur qu’à l’extérieur. Et puis, en 2021, un tel manque de consistance ne peut que mener à une déception télévisuelle. Si suite il y a, il faudrait remonter un peut le niveau.

Série prétexte et même parfois nunuche, on est transbahuté entre sujets hyper morbides et scénettes d’ados en pleine crise amoureuse. Sans doute idéaux pour démarrer dans le visionnage de sujets fantastiques, les différents épisodes s’érodent pour ne donner qu’un final maussade au goût de « Je vais devoir me taper la saison deux pour faire une critique ». Dommage, car il y avait beaucoup de potentiel mais les aficionados, autant du surnaturel que de Sherlock Holmes, n’y trouveront pas leur compte. Comme quoi, que ça plaise ou non, ce n’est pas pour tout le monde.

Bon, pour la peine, je recommence Sherlock

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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