Zizanie dans le métro

Une course-poursuite mortelle entre un dégénéré déformé et une jeune femme dans les dédales du métro londonien ? Un peu que je veux voir ça ! Surtout quand on sait qu’il y a Christopher Smith à la réalisation. Britannique de son état, il a réalisé par la suite (notamment) Severance et Triangle. S’agissant ici de son premier long métrage, il décide de prendre le métro de Londres comme terrain de jeu, signant également le scénario. Tourné en partie dans une vraie station désaffectée, ce film augure du bon. Est-ce que c’est vraiment le cas ? Le métro est-il un moyen de transport sûr ? N’est-il pas dangereux de piquer un roupillon quand on attend le prochain wagon ? Et souvenez-vous ; dans le métro, personne ne vous entend crier.  

A Londres, Kate est une jeune femme dynamique et pleine d’ambition. A la sortie d’une soirée, elle décide de continuer la nuit ailleurs et tente vainement de prendre un taxi. Motivée et téméraire, elle s’engage dans les dédales du métro londonien afin d’arriver à sa prochaine soirée. S’assoupissant sur le quai dans l’attente de son moyen de transport, elle se réveille alors que les grilles sont déjà fermées. Le wagon qui s’arrête à la station déserte ne présage rien de bon, et Kate devra se battre bec et ongles pour survivre à la terrible nuit qui l’attend.

Cours, Lola, cours, Anatomie, La mémoire dans la peau, l’actrice Franka Potente joue le rôle de Kate. Jeune femme allemande vivant dans le grand Londres, elle fera preuve d’une capacité d’adaptation et d’une ténacité sans pareille face à l’horrible menace qui se dresse devant elle. Personnage dans le tir, développant nettement une compassion envers les autres, la finalité du métrage en dira long sur ce qu’un être humain est capable de faire lorsque sa vie est en jeu. Avec quelques métrages à son actif, Vas Blackwood est George, travailleur dans les égouts de la ville, se retrouvant au mauvais endroit au mauvais moment. Performance d’acteur intéressante avec un contenu émotionnel non négligeable. Jeremy Sheffield (rien à voir avec Une nounou d’enfer) est Guy, collègue insistant de Kate et chair à canon de circonstance.

Puis, il y a Sean Harris, anglais à la filmographie maintenant rutilante, interprétant ici Craig, le zinzin du secteur. Antagoniste ambigu, il est clair que ce dernier a une certaine passion pour la chair humaine précédemment macérée dans quelques eaux troubles. Clairement à la masse, l’interprétation de l’acteur est très bien vue, apportant une dimension humaine à un méchant qui ne semble pas l’être. A certains moments, on le prendrait en pitié. A d’autres, on le massacrerait à coup de Morgenstern sans préavis. La calure de ce rôle, c’est de donner une difficulté à trancher sur ce que l’on ressent vis-à-vis de lui… même s’il reste un fieffé salopard.  

Imaginez ; vous vous trouvez sur le quai du métro et vous reposez vos yeux un instant, juste assez longtemps pour que vous vous retrouviez bloqué, les accès fermés. Potentiellement réaliste, non ? Eh bien partant d’un postulat comme celui-ci, le scénario va prendre en puissance, jouant la carte d’un certain réalisme, dans les choix des protagonistes comme dans les situations. Pas d’exagérations incongrues ou de rafistolage scénaristique. Ça se suit sans problème, intégrant de nouveaux personnages comme Jimmy (Paul Rattray) et Mandy (Kelly Scott), et justifiant leur présence en ces lieux. Quand j’y pense, heureusement que le mec ne s’appelait pas Billy (les acharnés de dessins animés verront de quoi je cause).

La présence de Craig, créature difforme et toquée du système dans le réseau souterrain, est également compréhensible et partiellement expliquée, même si l’on se demande comment il a pu réellement se débrouiller pour être toujours de la partie. Quoiqu’il en soit, cela donne l’occasion de quelques scènes bien terribles pour agrémenter ce personnage loin d’être haut en couleur, mais balèze en malaise.

Eh oui ; dans Creep, il faut s’attendre à de l’horreur. Déjà par la présence d’une certaine tension durant tout le métrage. L’obscurité est notre ennemie, on ne connaît pas les lieux et apparemment, un déglingo en puissance est à nos trousses. Et c’est qu’il connaît le coin comme sa poche, le bougre ! Du coup, se cacher devient difficile et y échapper encore plus. En jouant sur les peurs primales de l’être humain, Christopher Smith tend nos petits nerfs durant tout le film.

Mais cela ne s’arrête pas là. En mettant un enfant des sous-sols complètement cintré au centre de son histoire, le réalisateur va nous gratifier de plusieurs scènes franchement sanglantes. Pour preuve, le coup de la table d’opération. Tout en longueur et en étrangeté, agrémentée de plaintes et de cris, avec un Craig tout pépère qui s’apprête à passer à l’action, on a de quoi être tendu avant de voir quoique ce soit. La finalité de la scène, radicale, ne laisse aucun répit à notre palpitant. Hémoglobine en rab et tension bien maîtrisée.  

Et puis, il y a le cadre. Tourner en partie dans le métro londonien ne devait pas être une mince affaire. Mais Christopher Smith se débrouille bien. Le cadre vieillot, les égouts à proximité, le système de cage de Craig, ce dernier complètement difforme s’amusant avec des instruments de chirurgie rouillés ; Creep est crade. Tout suinte l’eau sale et la transpiration sanglante, nous immergeant dans un univers sombre, moite et malsain. Cette impression de saleté ressort durant une bonne partie du film et aide grandement à l’ambiance.

La fin ne laisse pas de réelle surprise, si ce n’est ce qui a été dit concernant le personnage de Kate. Il est intéressant de voir à quel point les choses peuvent changer lorsque notre intégrité est mise en jeu. La dernière image évoque clairement un changement définitif d’état d’esprit, pour le meilleur, j’en suis sûr. En plus, le chien survit et ça, c’est une excellente chose ! Non, sérieusement, ça m’a carrément soulagé.

Le film remet également en question les standards de survie par rapport à notre vie pépouze, loin des affres diaboliques des méchants planqués dans les sous-sols. La belle Kate, à l’aise en société, pimpante comme une star de cinéma, se retrouvant soudainement à devoir se battre pour sa survie et à aider des SDF malchanceux. Une manière comme une autre de taper sur l’épaule des gens pour leur dire « Eh, ce n’est pas quand ta vie en dépendra qu’il faut commencer d’aider les autres ». Une morale ? Non ; une constatation.

Creep est un bon petit film d’horreur crado et obscur. Avec une intrigue dans le métro, lieu peu commun pour ce genre de métrage (contrairement à une bonne vieille cabane dans les bois), il sort un peu des sentiers battus tout en proposant une histoire commune mais intéressante. Des acteurs corrects, du sang sur l’objectif, un certain goût pour le crade, Christopher Smith signe son premier long métrage sur une bonne note, bien que ne révolutionnant pas le genre. Non, car à la place, il y a la possibilité de passer un bon moment horrifique tout en découvrant les dédales du métro londonien et ça, c’est la classe. Conseillé aux amateurs d’horreur sympa et aux usagers des transports en commun souterrains.

Depuis ce film, j’ai appris que marcher, au fond, ce n’était pas si mal.   

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

Partagez cette page