Ah, les voisins...

Un petit film d’horreur suédois, ça vous tente ? Il faut dire que l’esthétique des films du Nord me laisse toujours un goût de réussite et c’est donc avec plaisir que j’ai débuté le visionnage de The Other Side, sorti en 2021. Réalisé par Tord Danielsson et Oskar Mellander, tous deux habitués à la direction d’épisodes de séries télévisées suédoises, ce métrage nous cause de famille recomposée, de maison hantée et de de voisins pas franchement chouettes. Ouais… du déjà-vu en somme. Mais est-ce que les choses pourraient être différentes ? Si ça nous vient du froid, est-ce que nous allons frissonner ? Ne faudrait-il pas changer de registre ? On garde de bons rapports de voisinage et on se lance dans la critique. ATTENTION cet article contient des spoilers

Fredrik (Linus Wahlgren) emménage dans une nouvelle maison avec son fils Lucas (Eddie Eriksson Dominguez) et sa petite amie Shirin (Dilan Gwyn). Celle-ci, peinant quelque peu à entrer dans son rôle de belle-mère, se voit obligée de passer plusieurs jours seule avec le fiston. C’est alors que des manifestations étranges vont démarrer et que Lucas va se faire un nouvel ami dans la maison d’à-côté… qui est pourtant vide depuis plusieurs années.

Comme le veut la tradition, le métrage démarre avec une scène passablement percutante d’un enfant se faisant transbahuter à travers une maison glauque alors que sa mère tente de le rattraper. Le ton est donné ; ça va être sombre et teinté de mystère.

Il est ensuite temps de faire la connaissance des protagonistes. La petite famille roule en direction de leur nouvelle maison pour la visiter, nous donnant l’occasion d’en savoir un peu plus sur eux. Shirin tente de communiquer du mieux possible avec Lucas, le fiston de Fredrik. Il faut dire que perdre sa mère aussi jeune soulève pas mal de questions et Shirin se retrouve à prendre un rôle qu’elle ne connaît pas. Heureusement, Fredrik gère relativement bien la situation.

Outre le fait que les acteurs n’en soient pas à leur coup d’essai, il y a une certaine inconstance dans leurs rôles respectifs. Par-là, j’entends que nous avons parfois l’impression qu’ils tâtonnent pour parvenir à trouver le ton juste. Cela dit, l’écriture des personnages, bien qu’assez light, nous permet d’entrer facilement dans leur vie, grâce notamment à un contexte réaliste.

Puis, arrive la barraque. Il s’agit d’une maison mitoyenne dont un côté à été entièrement refait et l’autre laissé à l’abandon. Ce dernier est inhabité depuis plusieurs années et c’est un peu plus tard dans l’histoire que Shirin va apprendre qu’il y a eu une disparition d’enfant qui s’est opérée dans leur nouvelle demeure. Hin, hin… ça sent les ennuis.

Car, bien entendu, les manifestations paranormales vont se déclencher (hors de la présence de Fredrik, sinon, il n’y aurait pas d’enjeux) et faire de la vie de Shirin et de Lucas un enfer. A ce titre, il faut dire que les deux réalisateurs connaissent le domaine horrifique ; utilisation des arrière-plans, jump scares avec parcimonie, ambiance globale assez glauque. Le film possède sa propre esthétique ; c’est sombre, laissant juste quelques pans de couleurs lorsque cela est nécessaire. Tout ce qui est de l’ordre de la lumière est du son, c’est franchement du bon boulot.

Mais est-ce le cas aussi au niveau du scénario ? Tant sur le fond que sur la forme, The Other Side ne présente rien de nouveau. Cependant, on peut noter que la volonté du film n’est pas seulement de nous présenter une maison hantée par une entité vicelarde (dont on ne saura pas grand-chose, au final) mais bien de nous interpeller sur la difficulté de prendre sa place dans une nouvelle famille.

A cela, nous voyons l’évolution du personnage de Shirin qui, en plus de violemment se battre pour que Lucas ne tombe pas entre de mauvaises mains, doit faire face à l’incrédulité de Fredrik, ce dernier croyant dur comme fer que les ecchymoses apparues sur le corps de son fils sont du fait de Shirin… et non d’un esprit malfaisant. Ben oui ; pourquoi elle serait hantée la maison, hein ? A croire que les gens dans les films d’horreur… n’ont jamais vu de films d’horreur.  

Et c’est ainsi qu’après plusieurs péripéties bien standards, nous en arrivons à la confrontation finale, remplie de symbolisme et de pertinence… pour autant que l’on ne s’arrête pas simplement à la vision de « Shirin VS Esprit pas cool ». Puis, tout est bien qui finit bien, même si j’ai de gros doutes que les quelques mots de la jeune femme suffisent pour que le monstre leur fiche la paix.

Quel est le constat final ? Ce film possède sa propre atmosphère, une esthétique bien foutue et, il faut l’avouer, quelques moments de tension bienvenus (la lente ascension de Shirin jusqu’à la compréhension que tout cela vient d’un esprit, les passages dans le grenier, les visuels épisodiques de la créature). Cependant, cela ne complète pas une histoire vue et revue ainsi qu’un jeu parfois approximatif bien que tendant vers une certaine réalité.

Le métrage va donc nous parler beaucoup plus sur une seconde vision de lecture, c’est-à-dire concernant la place de Shirin dans cette nouvelle famille. Devenant la belle-mère de Lucas, elle doit alors endosser le rôle de la mère défunte du bambin sans la remplacer. Situation extrêmement délicate qui, du moins dans le film, nous est présentée de manière réaliste et concrète. C’est peut-être ça qu’il faut le plus retenir de cette histoire.

Ne bousculant pas les conventions, The Other Side reste sympathique à regarder en cas de pénurie de métrages horrifiques ou si vous appréciez les films du Nord avec une bonne esthétique. Dans le cas contraire, en tentant de mettre une difficulté familiale en avant, nous sommes loin d’un Mister Babadook ou Hérédité. Cependant, je pense que les deux réalisateurs en veulent et pourquoi ne pas suivre leurs prochains développements.

Heureusement, j’ai des voisins cools.