On le perd ! Allez chercher un chariot de réa' !

Sorti en 1990, L’expérience interdite regroupait une bande d’acteurs forts sympathiques malgré une réalisation cool mais pas impérissable. Bien entendu, nous sommes dans la ligne de tir des remakes et il était tout à fait normal que ce film y passe un jour ou l’autre. Pour réaliser la reprise de ce métrage, on fait appel à Niels Arden Oplev. Danois de son état, il s’est notamment illustré pour avoir été aux commandes du film Millénium de 2009. Comment faire pour effectuer le remake de L’expérience interdite aujourd’hui ? Le sujet est-il toujours d’actualité ? Doit-on se préparer à nous shooter de l’adrénaline ? On garde son calme et on attaque la critique. ATTENTION : cet article contient des spoilers

Une étudiante en médecine, Courtney, rongée par la mort de sa petite sœur des années auparavant, entreprend de mener une expérience de mort imminente sur sa personne afin de définir ce qui se trouve dans l’au-delà. Quatre de ses amis vont l’aider dans sa tâche. Après son retour, elle fait preuve de capacité hors du commun et les autres étudiants se lancent également dans ce voyage extraordinaire. Mais on ne peut pas revenir de l’au-delà sans en supporter les conséquences.

Difficile de contrer une équipe comme celle présente lors du premier film. Pourtant, en tête d’affiche, nous avons une certaine Ellen Page. Cette excellente actrice joue le rôle de Courtney, une jeune femme souhaitant pratiquer l’expérience de mort imminente afin de savoir ce qui se trouve de l’autre côté, et surtout pour savoir si sa petite sœur s’y trouve. Diego Luna est Ray, un étudiant doué se retrouvant impliqué dans l’expérience malgré lui. Nina Dobrev aura le rude rôle de Marlo. Jeune femme devant travailler dur pour parvenir à ses fins, elle se retrouvera dans l’une des situations les plus complexes du métrage. L’ambitieux Jamie est joué par James Norton. Recherchant la gloire et le prestige, il voit une possibilité unique en participant au jeu dangereux proposé par Courtney. Pour compléter le groupe, Kiersey Clemons interprète Sophia. Jeune femme devant beaucoup à sa maman, elle suit sa meilleure amie Courtney dans cette aventure de dingues. On peut également noter la présence de Kiefer Sutherland dans le rôle du Dr. Wolfson, mentor des étudiants, qui fait un passage sans réel intérêt dans ce métrage.  

On ne va pas creuser plus que nécessaire ; les personnages sont potentiellement intéressants. D’ailleurs, quelques surprises nous attendent concernant ces derniers et c’est une bonne chose. Malheureusement, on entre un peu dans les clichés et, tout comme dans le premier film, l’empathie ne fonctionne pas. On en vient presque à souhaiter, parfois, que lorsqu’ils passent de l’autre côté… ils n’en reviennent pas. Et cela ne s’améliore pas durant le film. Le problème n’est aucunement les prestations en elles-mêmes mais sans doute une écriture trop en surface, collant les personnages à leurs erreurs passées sans foncièrement creuser leur personnalité.

Rapidement, revenons sur le film d’origine par rapport à celui-ci. La démarcation est claire ; en 1990, nous avions droit à un thriller surnaturel typique de ces années-là. Avec ce remake, c’est évidemment un film horrifique « so 21ème siècle » qui nous attend. Jouant plus sur l’horreur que sur un réel élément de tension, L’expérience interdite version 2017 nous emmène sur un chemin à la fois totalement identique et radicalement différent. Plus de détails ci-dessous.

Le scénario est le même que celui du film précédent, à savoir une bande d’étudiants jouant les apprentis sorciers à se faire claquer les uns après les autres pour voir ce qu’il y a au-delà de la ligne. Les raisons ici sont cependant différentes, car Courtney le fait pour trouver des réponses par rapport à sa sœur et non pas pour des raisons idéologique ou se mettre en quête de gloire.

Du coup, en connaissant l’original, on va surfer sur la même idée, jusque dans la solution finale dans laquelle il suffira de faire face à ses erreurs pour pouvoir s’en sortir. Concernant ces dernières, nous aurons la culpabilité de l’abandon d’une femme enceinte, des brimades scolaires, des falsifications de dossiers et la mort d’une jeune fille. Tiens, on a à peu près les mêmes que dans l’original. Bien, bien.

Vous l’aurez compris ; aucun tour de force au niveau du scénario qui restera solidement le même en mettant au goût du jour les différentes situations. Jusqu’au dénouement, on restera dans cette ligne de tir, sans que ce nouveau film ne parvienne à oser quelque chose de plus. Comment ça ? Il y a une différence notable ? Ah, oui !

L’un des étudiants en question passera l’arme à gauche durant le métrage, ce qui n’était pas le cas dans le précédent film. Cela amènera alors les survivants à trouver la solution à leur mal-être et à passer à autre chose en affrontant leurs erreurs et en revenant sur le passé pour en faire table rase. Oui, dans ce contexte, on peut dire que ce remake va plus loin que l’original.

Autre modification de taille ; le statut d’angoisse. Ça restait très gentillet dans les années 90, on passe la vitesse supérieure en 2017 ! Les séquences durant lesquels les protagonistes se retrouvent face à leurs péchés sont dès lors plus cossues et plus horrifiques… mais reste parfois longuettes. A l’instar de la scène dans l’appartement de Courtney, on a l’impression qu’on cherche à tirer en longueur pour nous mettre la tension alors que cette dernière retombe inévitablement. De plus, les éléments horrifiques présents dans le métrage sont vus et revus ces dernières années dans les films de genre et ne sont donc pas une surprise.

Même si les jump-scares fonctionnent, on s’y attend pratiquement à chaque fois. Il faut mentionner qu’à certains moments, le réalisateur joue habilement sur le fait de montrer sans nous faire sursauter, ce qui exerce sur nous une angoisse bienvenue, tout comme dans la scène du bateau. Pour le reste, on est dans le convenu absolu et il n’y aura rien de neuf à se mettre sous la dent.

Les effets spéciaux, au moins, il y a quelque chose à en tirer ? En bien, en prenant en compte le fait que nous nous retrouvons sur les rails archi-connus des moyens actuels de faire sursauter les gens, je ne dirai qu’une chose ; bénis soient les fonds verts ! Avec un au-delà ayant clairement des relents de Silent Hill, il faut dire que même dans cet aspect-là du film, on est relativement déçu. Au moins, les maquillages sont bien fichus… mais renvoient aux nombreux films d’horreur déjà présents sur le marché. Pourquoi aucune originalité ? POURQUOI ?

Pire, le sujet central du film est, à nouveau, mal exploité. Les étudiants découvrant ce monde de l’au-delà s’arrêteront simplement à cette exploration et aux capacités qu’ils se découvrent par la suite… sans aller plus loin. La scène dans la neige, ou Courtney et l’un de ses amis « flatliner » sont au diapason sera ensuite passée sous silence. Pas d’explications sur le fait d’avoir de nouvelles capacités suite à ce voyage, ni même de réflexion sur la vie et la mort. Le constat s’arrêtera à « comment va-t-on faire pour s’en sortir parce que c’est la merde » sans prendre en considération l’avancée médicale et métaphysique qu’ils viennent d’accomplir. Dommage.

Même en prenant le film dans son contexte actuel et en faisant fi du fait qu’il s’agit d’un remake, l’électrocardiogramme reste à plat. Aucune audace, pas plus d’originalité, on se croirait devant un métrage sous-exploité qui aurait eu un potentiel nettement plus élevé en osant franchir cette ligne si convoitée par les étudiants en médecine.

L’expérience interdite, nouvelle version, n’apporte rien de plus, si ce n’est un renouvellement du scénario d’origine pour un public d’aujourd’hui. Avec des acteurs parfois peu convaincants, une ligne scénaristique peu profonde et des scènes horrifiques reconnues par le ministère officiel des constats de films d’horreur, nous n’aurons pas de tressaillements de plaisir en regardant ce remake. Préférez-lui l’original qui, au moins, à la chance d’avoir été réalisé dans les années 90 et bénéficie donc de circonstances atténuantes.

Non, laissez tomber le chariot de réa’. Heure du décès 12h19.