La fin d'une époque

Il aurait été possible de titrer cet article « Comment terminer une saga aussi populaire que Star Wars quarante-deux ans après son commencement ? ». C’est J.J. Abrams qui a la tâche délicate de boucler ce que l’on appelle « la saga Skywalker » avec ce nouvel opus sorti en 2019 ; Star Wars, épisode IX : L’Ascension de Skywalker. Depuis la reprise de la dernière section de cette ennéalogie en 2015 avec Le Réveil de la Force, les films plaisent, offusquent ou divisent. C’est donc avec un certain doigté qu’il faut appréhender la présente critique. Est-ce vraiment la fin d’une époque ? Comment clore une saga aussi vaste que celle-ci ? La Force a-t-elle encore un sens ? On embarque dans le Faucon Millenium une dernière fois et on se lance dans la critique. ATTENTION : cet article contient des spoilers

Vu au Cinéma Colisée de Couvet !

Alors qu’un ennemi redoutable fait parler de lui dans la galaxie, le Premier Ordre prend un essor inquiétant. Rey (Daisy Ridley) et ses amis doivent alors trouver un moyen de découvrir le repaire de cet antagoniste tout en prenant soin de ne pas se retrouver dans les griffes de Kylo Ren (Adam Driver), maintenant à la tête du Premier Ordre. De planète en planète, voyageant dans le but d’occire une fois pour toute la menace qui pèse sur la galaxie, la jeune Jedi va non seulement en apprendre plus sur son passé mais également découvrir son véritable potentiel.  

Quelques petites informations sur le casting. Pour commencer, tous les personnages jouent avec conviction et parviennent à nous transmettre une bonne dose d’empathie. On peut regretter cependant un certain manque de profondeur, sans doute dû au fait qu’il s’agit d’un métrage de seulement 142 minutes, expédiant parfois certaines réactions un peu à la va-vite. Typiquement, le décès de certains personnages ne semble pas grandement toucher les survivants.

Cependant, on retrouve un Kylo Ren / Ben Solo avec une prestance plus cossue que dans les opus précédents et une jeune Jedi (Rey) devant faire face à un destin qu’elle peine passablement à encaisser. Finn (John Boyega) prend de l’assurance ; Poe (Oscar Isaac) pilote et manie les punchlines toujours aussi bien ; Joonas Suotamo nous offre un Chewbacca impeccable ; et Ian McDiamid revient en tant que Palpatine pour menacer la galaxie. Ce n’est pas vraiment un spoiler vu que certaines affiches du film nous informent d’ores et déjà de sa présence.  

Dans les anecdotes sympathiques, on peut noter la reprise du personnage de C-3PO par Anthony Daniels, devenant le seul acteur à être présent dans TOUS les films de la saga. Billy Dee Williams nous fait l’honneur de revenir en tant que Lando Calrissian… trente-six ans après son dernier passage dans la saga. Keri Russell interprète Zorii Bliss mais sa jolie bouille ne sera pas visible, restant incessamment sous un casque. On peut aussi noter la présence vocale de pratiquement tous les acteurs ayant interprété des Jedi, tout opus confondu, lors d’une scène impliquant Rey et son destin.

Dans les caméos, on note la présence vocale du réalisateur J.J. Abrams qui donne sa voix à un petit robot prénommé D-O. Le coup le plus fumant revient sans doute à John Williams himself se la jouant gérant de bar sur la planète Kijimi. En plus de nous partager des interprétations musicales absolument hallucinantes, il trouve le temps de servir des godets, le bougre !

La fin de la saga n’aurait pas été la même sans la présence des trois monstres sacrés originels ; Leia Organa (Carrie Fisher), Luke Skywalker (Mark Hamill) et Han Solo (Harrison Ford). L’actrice étant décédée fin 2016, les scènes où elle est présente sont celles des précédents opus qui n’ont pas été utilisées et habilement construites de manière à ne pas avoir recours à la création d’image par ordinateur. Bel hommage.

La question que l’on est en droit de se poser est la suivante ; qu’est-ce que donne le scénario de ce dernier épisode ? Les enjeux sont grands car il s’agit de se dresser contre un ennemi terrible qui a toutes les cartes en main pour devenir le leader incontesté de la galaxie. Le Côté Obscur tout comme la Résistance doivent donc cheminer pour atteindre leurs buts respectifs, tout cela dans une cohésion bienvenue.

Certes, il y a passablement d’effets du type « ta gueule, c’est magique », comme l’apparition de certains personnages afin de débloquer une situation ou encore la présence d’éléments scénaristiques mis en place uniquement pour faire avancer l’histoire sans se prendre la tête sur leur pertinence ou la cohérence de leur présence. Cependant, là où l’opus précédent ne savait parfois pas vraiment sur quel pied danser, on sent ici une maîtrise manifeste de l’histoire.  

Les 142 minutes du métrage passent relativement vite et on ne s’ennuie pas. Les effets spéciaux y sont bien entendu pour beaucoup, bluffants, des couchers de soleils aux batailles spatiales. Nos yeux en prennent plein la tête et c’est un excellent point, permettant une immersion bien plus convaincante à chaque instant du récit.

La destinée de Rey est au centre de l’histoire et la jeune femme, en plus de prendre en assurance dans son rôle, possède une intrigue centrale des plus intéressantes. On suit donc avidement le scénario jusqu’à une bataille finale de toute beauté, un face à face terrible entre Jedi et Sith et un épilogue magnifiquement orchestré, terminant ainsi la saga de manière cohérente, belle et conforme à ce que l’on pouvait en attendre. A noter le clin d’œil du tout premier opus de 1977 via les dires de C-3PO lors de la grande célébration, comme quoi on ne voit cela que tous les quarante-deux ans.

Le récit parle donc de destinée, de choix, de possibilités de changement et de consécration. Quel est l’importance que l’on donne à notre personne et à ses capacités ? Est-ce qu’il est possible de faire de mauvais choix pour de bonnes raisons ? C’est autant de questions qui sont soulevées au travers du récit, trouvant même les réponses nécessaires à la fin de ce dernier.  

Donc, contrairement à son prédécesseur, cet épisode IX nous offre quelque chose de plus mature, axant moins son scénario sur le merchandising ou sur les blagounettes faciles. On rit, on pleure, on sent les poils de nos bras se dresser à maintes reprises et franchement, ce léger élan de nostalgie en se disant que c’est là que tout se termine ne fait qu’apporter la touche de sel nécessaire pour que ce dernier épisode ait un excellent goût.  

ATTENTION : à partir de ce point, des éléments importants de l’intrigue vont être révélés. Si vous n’avez pas encore vu le film et que vous souhaitez conserver une surprise totale, je vous invite à revenir après visionnage.

Vous l’aurez compris du fait de son titre, le film va parler de l’importance du nom dans les choix qui sont faits. Voilà pourquoi Rey, apprenant à quelle engeance elle appartient par le sang (« Palpatine », pas évident à porter), se retrouve autant tiraillée dans ses choix. C’est également cette raison qui la pousse, en toute fin de métrage, à terminer la saga de sa bouche avec ce simple nom qui évoque tout ; « Skywalker ». A noter également la couleur de son sabre (jaune) ; habile mélange du vert (Luke) et rouge (côté obscur), terminant ainsi la saga sur la notion de choix de l’héroïne, pour son nom d’une part, et concrétisant cela par la création de son propre sabre de couleur jaune.  

Comme mentionné plus haut, la fin est celle que l’on peut attendre d’une saga démarrée il y a quarante-deux ans. On retrouve le même « problème » que celui soulevé dans la critique du film Les Derniers Jedi ; nous ne sommes plus dans le contexte des seventies. Les choses ont évolué, parfois même drastiquement changées, et nous nous retrouvons maintenant avec des fans de Star Wars qui nous viennent de toutes générations ; ceux de la première heure (de 1977 à 1983), ceux de la prélogie (de 1999 à 2005) et ceux du dernier bastion (de 2015 à 2019). Impossible donc de contenter tout le monde.

Pourtant, en terminant le film là où tout a commencé, J.J. Abrams boucle la boucle sympathiquement et nous présentant une certaine émotion. Tout comme celle qui peut être ressentie lorsque nous voyons le masque de Dark Vador sur fond de la Marche Impériale, lors de l’apparition de Luke pour remettre Rey sur le droit chemin (sortant même son X-Wing des bas-fonds pour l’occasion) ou encore de voir les débris de l’Etoile de la Mort au centre d’un océan déchaîné. Ce dernier opus joue donc essentiellement sur notre corde émotionnelle pour nous emporter dans son histoire.

Outre les quelques faits probants durant lesquels ma main a frappé ma cuisse en m’exclamant « Non, mais, sérieux ? », du style les apparitions magiques de Lando alors que tout semble perdu ou encore le baiser échangé entre Rey et Ben, la structure même de l’histoire est sauve et durant les différentes scènes, on a l’impression que nous assistons non seulement à une histoire inédite nous menant vers une fin certaine, mais également que J.J. Abrams fait un barouf d’honneur à l’intégralité de la saga. La présence caméo des Ewoks ainsi que les voix de tous les Jedi ayant participé aux différents métrages est une preuve suffisante pour montrer que le réalisateur ne fait pas que suivre un cahier des charges ; il aime cette saga.

Grande question ; est-ce que c’est vraiment fini ? Tout d’abord, il faut préciser que depuis maintenant un certain temps, les films de 1977 à 2019 sont appelés « la saga Skywalker ». Il est donc tout à fait possible de retrouver un nouveau film Star Wars démarrant un nouveau cycle au cours de ces prochaines années. De toute manière, avec un univers aussi fourni, cela ne serait pas étonnant.

Durant le film, plusieurs pistes sont même données sans détour. Lando discute avec Jannah (Naomi Ackie) et apprend que cette dernière ne sait pas d’où elle vient. Il lui annonce alors avec un grand sourire qu’ils vont chercher. On peut aussi noter que Finn semble particulièrement sensible aux intuitions… et donc à la Force. Serait-il un potentiel Jedi ? Passer de Stormtrooper à Jedi, voilà ce que l’on peut appeler une promotion et pourquoi effleurer le sujet si c’est pour ensuite le bazarder ?

Mais ne nous emballons pas ; aucune annonce officielle pour le moment. Peut-être est-il effectivement temps de tourner la page et de se dire que ces quarante-deux dernières années ont été ponctuées de plusieurs métrages parfois inégaux mais nous ayant permis un divertissement franc et génialissime en nous présentant un univers vaste, des personnages iconiques et une saga incroyable, ayant impacté la culture générale de manière irrémédiable et définitive.

Oui, Star Wars, épisode IX : L’Ascension de Skywalker clôt la saga de manière correcte et cependant attendue. On se retrouve dans un élan de nostalgie bienvenu et l’histoire nous fait passer un agréable moment. Même si une profondeur semble manquante dans le comportement de certains personnages ou que les facilités scénaristiques sont tout de même des faits bien présents, n’en reste qu’il s’agit ici d’un chant intergalactique du cygne qui ponctue tout de même plusieurs décennies d’histoire. Le cinéma est fait pour rêver, s’évader, frissonner, rire et permettre la découverte de nouveaux horizons. Star Wars a réussi à faire tout cela. Qu’importe si la saga et ses différents épisodes divisent ou déclenchent parfois des débats ; le plaisir ressenti par chacun devant un palais de la culture pop comme cette saga va au-delà de ce qui peut être raconté.

Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine… se terminait la saga Star Wars.  

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

Partagez cette page