C'est pour un retrait ?

Les films se déroulant dans un endroit clos ont toujours le chic pour mettre la pression. Si l’on prend le tendu Phone Game de Joël Schumacher ou le claustrophobique Buried de Rodrigo Cortés, on se rend compte que plus c’est confiné et isolé, plus le spectateur conserve cette impression d’avoir zéro échappatoire. C’est ainsi que naquit ATM en l’an de grâce 2012, réalisé par David Brooks, un producteur s’essayant à la direction, et scénarisé par Chris Sparling, même créateur que Buried. Le film nous montre trois personnes bloquées dans un sas ATM (lieu possédant des distributeurs de flouze) avec un tueur rôdant dans les parages. Les sorties entre collègues, est-ce dangereux ? Les clichés ne sont-ils pas trop présents ? Tout ça pour une pizza ? On enfile sa doudoune et on se lance dans la critique. ATTENTION : cet article contient des spoilers

David (Brian Geraghty) et Corey (Josh Peck) travaillent tous deux pour la même banque. Pour les fêtes de fin d’année, l’entreprise organise un petit apéro durant lequel David se dit qu’il pourrait enfin inviter Emily (Alice Eve) à dîner avant qu’elle ne change d’employeur. Devant ramener Corey chez lui et profitant de l’occasion pour passer du temps avec sa belle, ils se retrouvent tous à retirer de l’argent dans un ATM perdu au milieu d’un parking. Soudain, un tueur apparaît et leur bloque la sortie. C’est le début d’une nuit d’horreur pour les trois collègues… et pour nous aussi.  

On commence fort avec des personnages hauts en couleur ! David reste le plus convaincant de la bande malgré une timidité exacerbée et un manque crucial de sang-froid. Dans le cas de Corey, soyons honnête, on a carrément envie de l’acheter pour le baffer tant il est insupportable. Avec un pote comme ça, David n’avait clairement aucune chance avec Emily. Concernant celle-ci, son côté niais au possible et sa détermination à jouer l’ascenseur émotionnel (« Laissez-moi seule… non, attendez ! J’ai un plan pour sortir d’ici ! ») n’aident pas des masses. Etonnant dans un certain sens car nous avons ici des acteurs qui ont déjà pratiqué le métier depuis plusieurs années et devraient donc plutôt nous attirer l’empathie plutôt que l’envie de cramer la pellicule.

Il faut regarder plus précisément dans l’écriture des personnages et du scénario. En effet, à part quelques informations grattées via les boutades peu orthodoxes de Corey, nous n’en savons pas beaucoup sur ces business people et ce manque de profondeur peut expliquer, en partie, pourquoi on s’en cogne autant de leur destinée funeste. L’histoire, elle, n’aide pas non plus à l’affaire.

Le concept de parquer des individues dans un endroit clos et d’y ajouter un tueur dans les environs n’est pas mauvaise. Preuve en est, Phone Game parvenait à nous tenir en haleine du début à la fin, le tout dans une cabine téléphonique. UNE CABINE TÉLÉPHONIQUE ! Ici, ladite cabine est remplacée par un baraquement de distributeurs de billets. On flanque un personnage louche et meurtrier devant la porte et le tour est joué.

Le tueur est un remake de celui d’Urban Legend et reste cependant très humain ; il court, semble paniquer quand l’un des protagonistes ose sortir du sas et fait preuve d’une brutalité expéditive. Mais à part graviter autour de la structure, dézinguer tous ceux qui s’approchent du secteur et jouer à Mr. Bricolage sur la porte arrière, il ne fait pas grand-chose. Ses motivations sont un tant soit peu suggérées mais n’apportent pas de réelle conclusion aux petites affaires qu’il traite en cette froide nuit d’hiver.

On suit donc les mésaventures des trois collègues, bloqués par un seul homme (…) dans l’ATM, sans téléphone, ni chauffage, ni arme. Le temps semble passer plus vite dans le film que dans notre triste réalité et ce ne sont pas les quelques exactions sanglantes du tueur ou les twists improbables qui vont nous aider à passer le cap. Il ne faut d’ailleurs pas loin d’une heure et demie de métrage pour qu’enfin les captifs pensent à utiliser le feu comme moyen d’appeler les secours pour s’en sortir… alors que l’idée a été lancée durant leurs premiers instants dans l’ATM.

Le scénario utilise des prétextes assez énormes pour tenter d’instaurer une tension (qui ne vient jamais, soyons clairs) comme par exemple le fait de garer le véhicule à une distance incroyable des distributeurs (à la base pour casser les noix à Corey, mais avancer l’auto par la suite était sans doute trop compliqué) ou encore de faire intervenir une tierce personne, totalement innocente, pour effectuer un regain d’intérêt. Un mort pour rien.

La liste pourrait être encore longue, comme le fait qu’une pizzeria en plein ville ne serait pas en mesure de prendre les cartes de crédit, auquel cas passer prendre de l’argent aurait été vain. Il en est également de même pour la tentative désespérée de déclencher le système incendie, acte duquel découle une mort aussi stupide que surprenante. C’est con David, t’y étais presque.

Un temps incommensurable et quelques morts plus tard, on assiste finalement au dénouement du métrage. David va plonger, le tueur va s’en sortir et le seul témoin devient alors le premier suspect. Sérieux, on ne l’avait pas vu venir, surtout avec le nombre de fois où l’on nous montre la caméra des distributeurs pour bien nous faire comprendre qu’on ne voit que les actions de la petite équipe et non le tueur. D’ailleurs, il décide apparemment de remettre ça, le bougre ! Un ATM 2 dans un ascenseur peut-être ?

Pourtant, malgré le manque terrifiant de cohérence, l’empathie de niveau zéro pour les personnages et le tueur en carton-pâte, on ne peut qu’avancer dans l’histoire en attendant ce fameux final qui nous plombe plus qu’autre chose. Le film est donc étrangement hypnotique et je pense que le fait que tout se passe dans un ATM aide grandement à nous garder collé à l’écran. Nous n’avons pas l’habitude de voir ce genre de chose et on espère grandement que ça va nous apporter du renouveau… mais en vain.

Personnellement, j’ai beaucoup aimé l’ironie que des employés de banque se retrouvent bloqués à cet endroit. Peut-être qu’au final, l’histoire voulait nous révéler une vérité cachée sur le sens profond de l’argent et de son fonctionnement dans notre société. Certes, cette ironie ne sauve pas le film mais permet au moins de se dire qu’au fond, le scénariste doit avoir un certain humour.

Avec un scénario qui s’écrit au fil du temps et qui tire en longueur tout ce qu’il est possible de tirer, ATM est définitivement un retrait. Personnages fades, idées saugrenues, tueur maniaque à la doudoune doucereuse, les amateurs du genre horrifique risquent fort de bâiller aux corneilles. Si vous aimez le froid, les distributeurs automatiques et les parkings isolés, ce film est pour vous. Dans le cas contraire, oubliez-le et ayez toujours du liquide sur vous.

A la fin du film, on se dit que l’expression « avoir du liquide » peut avoir un tout autre sens.  

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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