Monstrueux !

Entre 1989 et 1990, plusieurs meurtres frappent la Floride. Des hommes sont abattus par armes à feu. Un tueur en série sillonne les routes de la région. Ou plutôt, une tueuse en série : Aileen Wuornos. Finalement interpellée, jugée et condamnée, elle a été exécutée par injection létale le 9 octobre 2002. L’année suivante sort Monster, relatant une partie de la vie de cette tueuse et notamment sa relation avec Tyria Moore, sa petite amie, innocentée de tout crime. Derrière la caméra, nous avons Patty Jenkins qui signe ici son premier long métrage, et également le scénario. Au final, qu’est-ce que cela donne ? S’agit-il d’un documentaire romancé ou d’une romance documentarisée ? De quel point de vue se placer lors du visionnage de ce film ? Sa tonne de nominations et récompenses est-elle justifiée ? ATTENTION : cet article contient des spoilers

Aileen, une prostituée, pense fortement à en finir avec la vie. Histoire de dépenser ses ultimes dollars, elle se rend dans un bar gay pour y boire ses derniers godets. Elle y fait la connaissance de Selby, une jeune lesbienne un peu timide. A la fin de la soirée, les deux femmes décident de se revoir et une romance démarre entre elles. Une nouvelle vie semble commencer mais tout bascule. Une nuit, un client viole Aileen qui se défend en lui tirant dessus. Cette mort est le début d’une terrible descente aux enfers.  

Ah, Charlize Theron ! Avec plusieurs films à son actif avant celui-ci (notamment le très bon L’Associé du diable), elle arrive sur le tournage de Monster avec un bagage tout à fait correct. Et là, après ce film, c’est l’explosion ; 22 récompenses pour son rôle (dont le Golden Globe et… l’Oscar, s’il vous plaît) ! Monstrueux ! Entre le maquillage (enlaidir une des plus belles femmes du monde, ce n’est pas foncièrement évident) et sa performance d’actrice, Monster vaudrait le coup d’être vu rien que pour cela. On peut dire que Charlize Theron nous offre non seulement une leçon sur le métier d’actrice, et également l’une des prestations les plus incroyables du cinéma. Oui, oui, rien que ça !

Bien entendu, le casting ne s’arrête pas là. Christina Ricci (La Famille Addams, Sleepy Hollow) joue Selby Wall, la petite amie d’Aileen. Basé sur le personnage de Tyria Moore (on le rappelle, innocentée de tout crime), il y aura peu de ressemblance physique et situationnelle avec ce dernier, pour des raisons évidentes. Seulement, son histoire est touchante et sa prestation (surtout sur la fin) parvient à nous émouvoir, une gouttelette pouvant potentiellement se mettre à ruisseler le long de notre joue. Du très beau travail également.

On peut citer Bruce Dern dans le rôle de Thomas. L’homme à la filmographie rutilante interprète le seul ami d’Aileen, la croisant souvent dans un bar du coin. Les clients d’Aileen ne seront pas méconnus. Nous avons ; Lee Tergesen (Point Break, Oz), violent et déclencheur de tout ce bazar ; Pruitt Taylor Vince (JFK, Identity), acteur incroyable jouant le plus poli de tous les clients ; Marco St. John (Vendredi 13, chapitre 5, Thelma et Louise), dans une scène de défroquage malchanceux ; Marc Macaulay (Bad Boys), un client un peu trop paternaliste ; et le grand Scott Wilson (La Dernière Marche, Pearl Harbor), souhaitant tendre la main mais pas à la bonne personne. Les apparitions de ces acteurs, bien que courtes, sont bienvenues et de manière générale, le casting s’en tire admirablement bien (Charlize Theron en tête !).

Monster n’est pas un film documentaire, car il en existe tout de même un certain nombre. Nous avons ici un morceau de vie d’Aileen Wuornos, relativement romancé, et se focalisant principalement sur la relation avec sa petite amie, Selby. Nous n’aurons donc pas d’aspect horrifique, ni de scène avec un humour tendancieux. Ici, nous sommes dans le drame pur. Cela fait du bien de constater qu’il est possible de faire un « bon » film en reprenant un fait divers issu des actes d’un tueur en série. La plupart du temps, on bascule dans le n’importe quoi, la surenchère et le gore. Ici, tout est maîtrisé d’un bout à l’autre.

Depuis la rencontre entre Aileen et Selby, le scénario se suivra facilement, laissant le spectateur assister à la terrible déchéance de la grande dame, devenant de plus en plus timbrée, parano et violente. Le fait d’intensifier la lecture du film par le biais de la relation entre les deux femmes et une fabuleuse idée et permet un rendu beaucoup plus réaliste et émotionnellement plus intéressant. On se retrouve à prendre en pitié les déboires de ces amoureuses qui souhaitaient juste pouvoir profiter de la vie. Personnellement, la scène du parc d’attractions restera, pour moi, d’une maîtrise émotionnelle fortement bienvenue, alliant parfaitement le calme de l’œil du cyclone au milieu d’un déchaînement de violence. Beau, juste beau.

Le feeling entre les deux actrices principales fonctionne admirablement bien. Les tics et la grossièreté d’Aileen face à la douceur et la gentillesse de Selby donne un ton tout à fait adéquat au film, permettant réellement de romancer cette odyssée meurtrière sans en faire des caisses et surtout sans mettre les meurtres en avant. Ces derniers deviennent donc le reflet de la personnalité d’Aileen qui s’enfonce de plus en plus dans la paranoïa et la folie.

Le travail de l’image est également impeccable, les plans reflétant la réalité (sous le pont de l’autoroute, les chemins forestiers inquiétants, les bars colorés et bruyants) et ne cherchant pas à verser dans le clinquant tape-à-l’œil. La musique a sa part du lion dans le film, faisant tinter à nos oreilles des groupes comme Duran Duran, Blondie, Chemical Brothers ou Joan Jett. L’ambiance est donc ancrée à la fin des années 80, début des années 90, pour une immersion encore plus forte.

Monster, c’est aussi le moyen de briser les rêves de princesse. De manière ironique, en début de métrage, la voix d’Aileen nous confiera qu’elle aurait beaucoup aimé faire du cinéma. Elle recherche la reconnaissance, la célébrité, la maison avec la clôture blanche et la voiture dans l’allée. Parfois, ça ne se passe pas comme on le souhaiterait et c’est la dure réalité qui nous frappe en pleine tête. Aileen se retrouve donc à se prostituer pour vivre. Sa relation avec Selby lui redonnera un espoir, rapidement remis au placard via le client dépassant les limites. Un drame relatant les rêves brisés d’une femme qui s’est trop habituée à la facilité de tuer. Elle est effectivement devenue célèbre… mais pas pour raisons qu’elle voulait.  

Si vous aimez les drames, les histoires d’amour qui finissent mal et avez un intérêt pour la psychologie criminelle et les tueurs en série, ce film est fait pour vous. Si vous vous en tamponnez le coquillard de tout ça, regardez-le quand même car on y voit l’un des rôles les plus marquants du cinéma via le personnage d’Aileen, interprété magistralement par Charlize Theron. Si l’on ajoute à cela un très bon casting, une histoire dramatique, de l’émotion et un final sobre et cohérent avec la réalité, vous obtenez un excellent métrage méritant clairement une visualisation.

I-N-C-O-N-T-O-U-R-N-A-B-L-E !

Derniers commentaires

13.06 | 05:23

Merci pour le concours

03.04 | 19:28

Merci, bonne soirée à tous. 😊🍀

22.03 | 14:38

super

22.02 | 21:57

En effet cher Critiker 😉 très bonne critique du film, qui me rappelle une discussion... devant la salle du ciné 😅 Mark Wahlberg si j'ose (il manque pas d'air le Beep... Enfin si, mais là c'est Mark)😱

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